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Les évêques
Le corps du Christ devient mon corps, pour que, petit à petit, le Christ agisse en moi, par moi

Publié le 04 juin 2018

Le corps du Christ devient mon corps, pour que, petit à petit, le Christ agisse en moi, par moi

Homélie de Mgr Emmanuel Gobilliard – dimanche 3 juin 2018.

Le mystère de l’Eucharistie est un mystère incompréhensible, inaccessible parce que trop proche, trop simple, trop pauvre. Je trouve intellectuellement le mystère de la Trinité plus facile à comprendre : le mystère d’un Dieu qui est une communion d’amour, dont la différence des personnes est le socle même de son unité. Dieu un dans la différence des personnes nous rappelle que l’amour est toujours communion, qu’il ne peut être tourné vers lui-même, qu’il est dynamique, qu’il s’engage dans l’action. Le mystère de la Trinité est donc logique même s’il dépasse les limites de notre petite intelligence. Le mystère de l’Incarnation est déjà plus difficile à comprendre : le Dieu infini s’invite dans le fini, le tout puissant se fait faible pauvre et nu, le Saint prend sur lui les conséquences du péché. Le mystère de l’Incarnation nous fait peur parce que Dieu s’approche résolument de nous, il se fait l’un de nous, il prend notre chair de péché ! C’est cela qui nous fait peur : que Dieu s’approche ! Nous préférerions tellement que Dieu reste là où il est, loin, hiératique, juge. Enfin qu’il ne vienne pas se mêler de nos affaires. Le savoir loin, cela nous permet de nous occuper de nos petites préoccupations sans se faire déranger. Et puis intellectuellement c’est déjà plus difficile, cela nous oblige à croire à la résurrection de la chair. J’ai déjà fait une homélie sur le sujet donc je ne vais pas y revenir, mais quand même c’est un mystère difficile !

Le comble, c’est quand même l’Eucharistie. D’ailleurs dans l’histoire de l’Eglise, ce mystère, trop difficile, n’était accessible qu’aux initiés, et on disait au début de la célébration : « les catéchumènes, dehors ! » Et encore aujourd’hui, nous devrions nous souvenir que l’Eucharistie, on ne doit pas la proposer à ceux qui n’ont pas encore la possibilité de recevoir la beauté et la grandeur d’un tel mystère. Ce n’est pas juste un geste fraternel de partage. Même si la dimension horizontale reste présente, la réalité, c’est quand même celle d’un Dieu qui s’invite au plus intime de nos vies : « Nous viendrons en lui ; nous ferons en lui notre demeure » nous dit Jésus dans l’Evangile à propos de son Père et de Lui. C’est de cela dont nous avons peur, parce que nous nous sentons dans le fond indignes d’une telle grâce. Mais pourquoi Jésus a-t-il choisi ce moyen ? Parce qu’il nous aime et que lorsqu’on aime, on veut être uni à ceux qu’on aime. Il ne faut pas faire de grandes réflexions intellectuelles pour comprendre le sens de l’Eucharistie. C’est même l’inverse ! Ce mystère est accessible aux simples et aux humbles. « Il élève les humbles ! » L’Eucharistie est d’abord une nourriture. Et que se passe-t-il lorsque je reçois de la nourriture ? Je la digère, je l’assimile, et par le miracle de la création, elle vient nourrir chacune de mes cellules en passant dans mon sang, au point que je ne peux plus faire la distinction entre la nourriture que j’ai prise et mon propre corps. Si je me souviens que la nourriture que j’ai prise est le corps du Christ, alors, je peux dire que le corps du Christ vient nourrir mon corps au point que je ne peux plus faire la différence entre le corps du Christ et mon propre corps. Le corps du Christ devient mon corps, pour que je devienne, petit à petit, dans mes actions, dans mes paroles, dans mes pensées…le corps du Christ, que je lui ressemble, que je donne ma vie à mes frères, que le Christ agisse en moi, par moi ! En fait il n’y a pas d’union plus intime que cette union que veut réaliser le Christ avec chacun d’entre nous dans l’Eucharistie ! Ainsi, par l’Eucharistie, se réalisent les promesses des prophètes, le rêve des mystiques, Dieu va jusqu’au bout de l’union avec l’humanité !

Pourtant je viens de rappeler qu’il ne fallait pas que l’Eucharistie soit proposée n’importe comment à n’importe qui. Est-ce à dire que Dieu rejette certaines personnes ? Bien sur que non ! Ce n’est pas de la magie ! Il ne suffit justement pas que je mange le corps du Christ pour que l’union se réalise ; une telle union réclame certaines conditions. La première condition, c’est que je sache qui je reçois, que je le connaisse. Si j’accueille chez moi un médecin, croyant que c’est un peintre en bâtiment, je risque de ne pas être guéri, parce que je ne vais même pas lui demander de me guérir, et d’ailleurs, si j’ai fait venir un peintre en bâtiment, alors que j’ai effectivement besoin d’un médecin, c’est que je ne sais même pas que je suis malade. Cela signifie que pour recevoir l’Eucharistie avec profit, il faut avoir la foi, il faut croire que celui qui vient à moi est capable de me guérir, bien plus, de me sauver : je dois déjà connaitre Dieu, le fréquenter, sinon je vais passer à coté de la rencontre. Cela s’appelle avoir le sens du sacré. Le sens du sacré, même s’il se manifeste par des gestes extérieurs, est d’abord une attitude intérieure : C’est Dieu lui-même qui vient. Je dois aussi savoir qui je suis, je viens de l’évoquer, je dois avoir conscience que j’ai besoin d’être sauvé, d’être guéri, que je suis pauvre et pécheur. Je dois donc à la fois avoir conscience de la grandeur de Dieu et de ma petitesse. Il me faut l’humilité. L’Eucharistie est pour les humbles. Seule la Vierge Marie est parfaitement adaptée à l’Eucharistie et en reçoit tous les bienfaits, parce qu’elle est humble, qu’elle a conscience de sa pauvreté, alors que nous en aurions tellement plus besoin qu’elle, parce que nous sommes pécheurs ! Pourtant avoir conscience de la grandeur de Dieu et en même temps de sa petitesse, cela ne suffit toujours pas. Souvenez vous que, dans l’Evangile de la pêche miraculeuse, lorsque Pierre a conscience de la grandeur et de la puissance de Jésus, et qu’en même temps il a conscience de sa pauvreté, il demande à Jésus de s’éloigner : A cette vue, Simon-Pierre tomba aux pieds de Jésus, en disant : « Seigneur, éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur. » L’effroi, en effet, l’avait saisi, lui et ceux qui étaient avec lui dans la barque »

Comme je le disais au début, nous avons peur que Dieu s’approche de nous, nous avons peur d’être aimés, peut être même d’être sauvés. Pour recevoir l’Eucharistie avec profit, il faut donc croire que Dieu est Dieu, qu’il se donne en son Fils, d’une manière unique et parfaitement adaptée à ce que nous sommes, dans l’Eucharistie, il faut croire que nous n’en sommes pas dignes, parce que nous sommes pécheurs et malades, et en même temps il ne faut pas avoir peur que Dieu lui-même s’approche de nous ; Nous devons croire que l’initiative vient de Lui, qu’il veut nous aimer, qu’il veut faire en nous sa demeure. La véritable humilité, comme la vraie pauvreté accepte de recevoir. Acceptons donc humblement de recevoir Jésus-Eucharistie, sans oublier qui nous sommes et qui il est ! Amen !

Père Emmanuel Gobilliard

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