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Les évêques
Liberté Egalité Fraternité

Publié le 30 septembre 2017

Liberté Egalité Fraternité

Homélie pour le baptême de la Promotion « Médecin Capitaine Genet ».

Lecture de saint Paul aux Corinthiens : « Je tombe à genoux devant le Père, qui est la source de toute paternité au ciel et sur la terre  » Evangile selon saint Marc : Le Paralytique de Capharnaüm : « On vient lui présenter un paralytique soulevé par quatre hommes »

Cette proclamation de foi de saint Paul, cette exultation, me fait penser à l’exultation de Jésus en Luc 10 : « À l’heure même, Jésus exulta de joie sous l’action de l’Esprit Saint, et il dit : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits  ».

A chaque fois, c’est en pensant au Père que le Fils exulte, que saint Paul exulte, que la Vierge Marie exulte dans le magnificat et que chacun de nous, nous devons exulter, tant le mystère qui y est exprimé est grand et beau. Nous devons tomber à genou devant un tel mystère, le mystère de la bonté de Dieu, le mystère de sa miséricorde, le mystère de sa paternité. C’est devant lui seul que nous devons fléchir le genou. Et pourtant, je me souviens d’avoir fléchi le genou lorsque moi-même j’ai vécu mon baptême de promotion comme officier, lorsque j’ai reçu d’un général mes épaulettes. Ce général était aussi mon père. Et je reconnaissais, dans cet officier, dans ce père, la présence de l’unique Père. Devant qui pouvons-nous nous mettre à genou ? Cette question est capitale et il n’est pas si simple d’y répondre. Des milliers de chrétiens ont été martyrisé pour avoir refusé de plier le genou, parce qu’en leur demandant de plier le genou, on leur demandait de renier leur Dieu, on leur demandait de détourner leur regard du vrai Dieu, on leur demandait aussi, souvent, de jouer la comédie. Mais quand je m’agenouille, même devant un homme, je ne joue pas la comédie. Je reconnais en lui, la présence de Dieu. Et quand je m’agenouille devant la Croix, je ne vénère pas un objet en métal, mais je m’incline devant le mystère de l’amour de Dieu qui se donne, qui me sauve, et qui me relève.

Lorsque j’étais aumônier d’hôpital, je m’agenouillais devant les malades, parce que la psychologue qui m’avait formé m’avait dit que c’était plus pratique et plus respectueux. En restant debout, me disait-elle, on est trop haut, trop dominant. En étant assis, on est trop loin, trop distant. En étant à genou, à côté du lit, on est à la bonne distance, à la bonne hauteur ; on peut prendre la main du patient, délicatement et lui parler doucement. Cette attitude est vraie, aussi parce qu’en étant à genou, on reconnait, en l’autre, la présence de Dieu lui-même, la présence du Christ. En nous mettant à genou, nous redonnons à l’autre sa dignité et sa liberté, sans perdre la nôtre. Au contraire, en nous mettant à genou, dans une telle attitude, de charité, d’humilité, de compassion, nous retrouvons nous-mêmes notre propre liberté. La liberté, ce n’est pas de refuser de se mettre à genou, la liberté c’est d’apprendre à se mettre à genou devant plus grand que soi. « Les pauvres sont nos maitres » disait saint Vincent de Paul que nous avons célébré mercredi. La liberté, ce n’est pas de faire ce qu’on veut, quand on veut, comme on veut. La liberté, ce n’est pas d’être influencé par personne. Cette liberté-là, qu’on appelle « liberté d’indifférence » nous plonge dans un esclavage bien pire, l’esclavage vis-à-vis de nous-mêmes, l’esclavage vis-à-vis du péché. Si la liberté, c’est de n’être influencé par personne, alors je suis libre de tout, sauf d’aimer, parce que lorsque j’aime, je suis influencé, évidemment par la personne que j’aime. La liberté, c’est de choisir par qui nous sommes influencés.

Vous serez libres, non pas à mesure que vous serez comme les autres, que vous serez dans une illusoire égalité qui se conjugue davantage avec la médiocrité qu’avec la liberté. L’égalité à laquelle vous aspirez en choisissant de servir, ce n’est pas l’égalité dont on ne cesse de nous parler et qui fait de nous des clones. Cette fausse égalité nous attire vers le bas et recherche désespérément le plus petit dénominateur commun pour en faire un point à atteindre. L’égalité que le Seigneur souhaite entre vous, c’est une égalité par le haut. Il vous veut heureux, il vous veut saints. Il veut que vous donniez le meilleur de vous-mêmes, que vous atteigniez votre sommet, celui qui fera de vous un être unique loin des comparaisons déprimantes. Nous serons alors tous différents, tous profondément aimables, tous beaux d’une beauté où nos imperfections et même nos blessures seront transfigurées par la grâce de la miséricorde, du pardon et de l’amour. Nous sommes beaux à mesure que nous avons vécu, nous sommes beaux du temps que nous avons passé auprès de ceux qui souffrent, des larmes de compassion que nous avons versé, nous sommes beaux de la sueur et du sang que nos visages de Christ auront laissé perler.

Nous avons souvent une fausse image de la pureté. La pureté n’est pas une valeur à conserver, quelque chose que vous auriez reçu à la naissance et que vous essayeriez, tant bien que mal, de conserver malgré les souffrances et les rencontres, comme on regarde s’écouler de nos mains repliées le sable qu’on essaye de garder. La pureté ne se garde pas, elle va se chercher, dans la charité. La pureté, pour nous, c’est une personne, c’est le Christ en croix. Il est sale, il est sanguinolent, il transpire…parce qu’il s’est livré, parce qu’il a tout donné, parce qu’il a accepté de se salir. Ne restez pas « droit dans vos bottes », vous seriez rigides et stériles. La pire des impuretés, c’est de se replier sur soi. Acceptez de vous salir les mains, d’aller au contact de l’autre, tel qu’il est et non tel que vous le rêvez. Alors vous vivrez la vraie fraternité ! Si vous reconnaissez en lui le visage du Christ, sa pureté, sa beauté, sa bonté, irradiera votre cœur d’une lumière apaisante et vous deviendrez des reflets de sa sainteté. Vous avez choisi l’un des plus beaux métiers. A partir d’aujourd’hui, parce que vous vous êtes envoyés, il devient aussi votre chemin de sainteté. Mais vous ne serez jamais saints tous seuls. L’Evangile nous le rappelle. Ils étaient quatre à porter le brancard. Si vous vivez cette charité entre vous, cette fraternité d’arme et de vocation, alors, le Seigneur lui-même pourra offrir la guérison que nous ne pourrons jamais offrir, celle des cœurs. Jésus a besoin de vous pour que vous portiez, par votre travail, par votre compétence, les corps de ceux qui ont surtout besoin d’être aimés et sauvés par Dieu lui-même. N’ayez pas peur d’être des saints.

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