Chargement du site...
Les évêques
« Seigneur qu’attends-tu de moi ? »

Publié le 24 avril 2018

« Seigneur qu’attends-tu de moi ? »

Homélie de Mgr Emmanuel Gobilliard – envoi en mission de 20 nouveaux volontaires MEP – le 22 avril 2018 à la chapelle des Missions Etrangères de Paris.

En ce dimanche du Bon Pasteur, nous prions pour les vocations. Nous pourrions prier pour les vocations tous les dimanches, parce que tous les dimanches, l’évangile nous dit quelque chose de l’appel que Jésus nous adresse personnellement. Mais aujourd’hui il nous dit quelque chose de spécifique. Il nous dit que nous sommes ses brebis, que nous le connaissons et que nous sommes appelés à le connaître.

Effectivement, la première étape de la vocation, c’est de se laisser connaître par Jésus.

Aujourd’hui, je voudrais vous rappeler que l’appel s’adresse à tous. Pas seulement aux jeunes qui sont en discernement d’un métier, d’un état de vie, mais aussi à nous qui avons déjà choisi, qui sommes inscrit dans une fidélité. On imagine la vocation comme une case dans laquelle il faudrait rentrer, comme un projet imaginaire, idéalisé auquel il faudrait correspondre, comme un avenir, ou comme un passé si je suis marié ou si j’ai été déjà ordonné. Alors que la vocation bien sûr est un présent.

La vocation c’est d’abord et avant tout de demander au Seigneur à chaque instant et chaque matin : « Seigneur qu’attends-tu de moi ? », « Que veux-tu de moi aujourd’hui ? »

Alors bien sûr, vous qui vous préparez, dans un discernement, à un métier, à choisir un état de vie, vous vivez différemment cette recherche de vocation. Evidement ! parce que vous recherchez où sera votre place. C’est bien normal ! Néanmoins, le meilleur moyen de trouver sa vocation, son état de vie, ce n’est pas de faire une retraite d’une semaine et de dire au Seigneur : « Seigneur, dis-moi où est ma vocation. » Ça c’est très bien quand on a déjà entendu un appel, et c’est très bien de faire tous les ans cette retraite même quand on a déjà trouvé sa vocation.

Ensuite, c’est lorsque l’on a perçu quelques chose, un appel que l’on peut avoir besoin de faire une retraite pour discerner. Cette retraite permet de vérifier si cet appel est authentique, si je peux y répondre et comment je peux y répondre. Mais le meilleur moyen de trouver sa vocation, c’est de vivre, c’est d’agir, c’est de bouger. Ce n’est pas de rester enfermé, statique à attendre une parole qui ne viendra jamais. C’est être actif, avoir un projet aussi court soit-il ! Le service que vous vous apprêtez à vivre dans le volontariat international fait partie de ces projets qui vous aideront à discerner quelle est votre place dans la société, dans l’Eglise, quelle est votre vocation. Evidemment, cela reste inscrit dans un temps, c’une expérience de quelques mois ou d’un an, cela reste quelque chose de passager. Ceci dit c’est un projet qui s’inscrit dans d’autres projets. Vous avez certainement fait des études, vous avez vécu, vous avez agi, vous avez bougé, vous vous êtes donné et c’est comme ça que vous trouverez votre vocation. C’est en cherchant de tout votre être. La recherche de vocation est quelque chose d’actif. Et d’ailleurs ce que nous dit le Seigneur dans cet Evangile est très beau et parfois même pose questions. En particulier lorsqu’il dit « je donne ma vie pour la recevoir de nouveau, nul ne peut me l’enlever, je la donne de moi-même, j’ai le pouvoir de la donner. J’ai aussi le pouvoir de la recevoir de nouveau ». Il l’a donnée ou pas ? pourquoi après l’avoir donnée, il la reçoit de nouveau ? Il la redonne de nouveau ? Eh bien oui ! Quel magnifique témoignage de ce qu’est la vocation et de ce qu’est la vie ! c’est de se donner en permanence !  C’est de donner sa vie chaque jour ! C’est de se donner à l’autre ! Ce sera parfois fatiguant, épuisant, mais ce sera toujours ressourçant. Pourquoi ? Parce que m’étant donné totalement, j’aurai la possibilité d’être renouvelé, d’être ressourcé.

Si je garde tout pour moi, ma vie et toutes mes qualités, je ne pourrai pas être renouvelé, et je ne pourrai pas vivre chaque jour comme un renouvellement de ma vocation, y compris pour ceux qui sont déjà mariés, qui sont prêtres ou religieux. Votre vocation elle bougera. Tous les jours elle se transformera. Tous les jours, elle changera. Tous les jours, elle sera appelée à revivre au contact du Seigneur. Parce que la vocation que nous sommes appelé à vivre c’est ce contact-là. C’est cette rencontre personnelle avec le Seigneur dans la prière, dans la charité, dans le service des pauvres, dans la mission, dans le devoir d’état aussi. C’est comme cela que se vit la vocation, que se renouvelle notre vocation. Petit à petit. Sinon on risque de tomber dans l’acédie, c’est-à-dire la paresse spirituelle, le confort spirituel dont parle souvent le Pape.

Le Pape justement nous a donné un magnifique enseignement, le 9 avril, le jour de l’Annonciation cette année, Gaudete et Exultate. Dans cette exhortation, il y a une phrase qui renouvelle profondément le concept de la vocation. Il ne dit pas chaque saint a une mission à accomplir. Il dit « Chaque saint EST une mission ». C’est-à-dire que, dans ce dialogue profond que j’ai avec le Seigneur chaque jour, avant d’avoir trouvé ou pas mon état de vie, dans ce dialogue profond, je vais découvrir qui je suis. Le Seigneur va me faire découvrir qui je suis, par son amour, par sa charité profonde, par la connaissance qu’il a de moi. Je ne sais pas qui je suis moi-même. Sois je me dévalorise, sois je me survalorise, sois je me compare ; autant d’écueils qui nous empêchent de vivre et de trouver notre vocation. Le Seigneur peut nous permettre de nous connaître profondément, avec joie, avec charité, avec humilité. Et c’est dans ce renouvellement même que se vit la question de la vocation et de la mission. Et donc, pour savoir comment correspondre à votre mission et bien demandez au Seigneur, vivez, bougez, donnez-vous et vous vous adapterez petit-à-petit. Il y aura comme un lien qui s’établira entre ceux vers lesquels vous êtes envoyés et vous-même. Vous vous découvrirez à vous-même. Vous découvrirez en même temps les autres. « Chaque saint est une mission » : c’est un profond renouvellement dans l’enseignement pontifical sur ce qu’est la vocation. Finalement, Il vous a créé, il vous a donné de magnifiques cadeaux. Ces cadeaux, c’est bien sûr ce que vous êtes, c’est aussi ce que vous avez reçu : votre éducation, votre formation, mais ce sont aussi les blessures et les difficultés que vous avez vécues. Dans ce que vous êtes, il ne faut pas oublier la faiblesse et la pauvreté. C’est comme si vous offriez tout au Seigneur. Lorsque vous vous présentez au Seigneur dans une mission, dans une vocation, offrez-lui tout ! Y compris vos blessures, vos pauvretés et même votre péché. Il n’y a rien en vous qu’Il ne puisse transformer, avec sa grâce, en quelque chose de beau. Le péché lorsqu’il est pardonné, la blessure lorsqu’elle est transfigurée par la présence de Dieu qui guérit, nous transforme et, d’une certaine manière, nous embellit. Laissez-vous toucher par son amour miséricordieux, par sa présence qui est douce et encourageante. Et n’ayez pas peur de ce que vous êtes à la lumière de tout ce que le Seigneur vous dit de vous-même. Parce que sinon vous vous comparerez. Vous essayerez de rentrer dans un moule prédéterminé, dans une vocation peut-être même, à laquelle vous essaierez difficilement de correspondre. Et comme vous n’y correspondrez jamais, vous serez dans un échec permanent ou bien dans une tristesse spirituelle.

La vocation se renouvelle chaque jour. La vocation se vit dans un dialogue ; dialogue avec le Seigneur, dialogue avec les autres et avec les pauvres, dialogue aussi avec vous-même. C’est la croissance spirituelle, c’est l’expérience de la miséricorde, c’est l’expérience de la confiance du Seigneur sur vous.

Dans la question de la vocation, il y a aussi le fait que, puisque cette vocation est quotidienne, elle est aujourd’hui, cela donne une espérance considérable à ceux qui croient qu’ils sont en dehors de toute vocation. Quand je parle des vocations, je n’oublie jamais de citer ceux qui se trouvent un peu hors cadre. Il y en a qui auraient tellement aimé se marier. Il y en a tellement qui auraient aimé rentrer au séminaire ou dans la vie religieuse. Et peut-être n’ont-ils pas trouvé la personne qui convenait ou bien ont-ils été renvoyés de tel ou tel séminaire. On leur a dit : « Ce n’est pas votre vocation ». Ils se retrouvent peut-être seuls et vivent une grande souffrance de ne pas correspondre à un état de vie précis. Ils sont célibataires depuis pas mal d’années. L’enseignement du pape du 9 avril dernier leur dit qu’ils sont une vocation. Ils sont une vocation ! La vocation c’est ce qu’ils sont ! Comme si le Pape, le Seigneur leur redonnait une espérance, même à travers leurs souffrances, leurs blessures – C’est d’ailleurs vrai pour les couples qui n’ont pas d’enfants – c’est vrai de tous ceux qui avaient imaginé une vocation un peu idéale, et vivent une vie qui ne correspond pas à ce qu’ils avaient imaginé. Le Pape leur dit vous êtes une vocation ! Vous êtes une mission ! C’est vous dont nous avons besoin ! Ce n’est pas de ce que vous êtes capable de faire, ce n’est pas d’un projet que vous auriez imaginé, c’est de vous dont nous avons besoin dans l’Eglise ! Le Seigneur a besoin de vous tels que vous êtes ! La bonne nouvelle c’est que le Seigneur a besoin de moi maintenant, aujourd’hui ! formidable ! et donc je vais pouvoir être actif aujourd’hui. Parce que la sainteté c’est aujourd’hui ! Ce n’est jamais demain. Dire « demain je serai saint », c’est stupide parce que Dieu est l’éternel présent. La sainteté c’est vivre la présence de Dieu. C’est vivre Dieu aujourd’hui, dans la mission qui m’est confiée aujourd’hui, rien que pour aujourd’hui comme dirait sainte Thérèse de l’Enfant Jésus qui est si proche des missions puisqu’elle en est la patronne. Alors demandons lui d’apprendre à vivre l’aujourd’hui, notre vocation aujourd’hui, notre état de vie aujourd’hui, notre recherche d’un état de vie aujourd’hui mais dans l’action, dans la charité, dans la rencontre quotidienne avec le seigneur. Et c’est son amour qui saura guider notre vie et qui saura donner un véritable prix, une véritable richesse à ce que nous sommes parce qu’Il nous connaît mieux que nous même. L’Evangile nous le dit, Il nous aime plus que nous saurions nous aimer nous-même. Il nous apprend à aimer et à connaître les autres.

Amen !

En savoir plus

événements à venir
Découvrez notre magazine
Eglise à Lyon n°71 avril 2024

Suivez-nous sur
les réseaux sociaux