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Les évêques
Il est l’agneau et le pasteur, il est le roi, le serviteur !

Publié le 22 novembre 2020

Il est l’agneau et le pasteur, il est le roi, le serviteur !

Retrouvez ci-dessous l’homélie de Mgr Emmanuel Gobilliard, pour la fête du Christ-Roi, ce dimanche 22 novembre 2020.

 

Aujourd’hui c’est le dernier dimanche de l’année liturgique, le dernier dimanche d’une année difficile, d’une année de crise pour notre Eglise, pour notre pays, pour notre monde. Personne n’y a échappé et pourtant nous l’avons vécu différemment, selon que nous étions victimes d’abus, victimes d’attentats, victimes de maladies, du covid ou d’autres maladies. Certains ont souffert la mort de proches ou ont lutté, dans les hôpitaux pour guérir et soulager. D’autres se sont battus pour maintenir tant bien que mal leur activité, ou se sont retrouvés désœuvrés. Nous avons dû apprendre à nous gouverner nous-mêmes. Cela aura été un des grands enseignements de cette crise. Il n’est pas facile de se gouverner, d’organiser sa vie lorsque nous perdons nos repères, nos habitudes, nos rendez-vous rassurants. Nous comptions sur telle retraite spirituelle, sur la messe du dimanche ou le pèlerinage à Lourdes pour nous redonner du tonus. Il a fallu, même dans la vie spirituelle, tout revoir, tout reconstruire. Certains ont dû réapprendre à vivre en famille, à être des parents, mais aussi des époux, des professeurs pour leurs enfants en même temps que des employés motivés même à distance et en visio. Cette période a été exigeante, pénible. Elle a restreint nos libertés. Pourtant aujourd’hui la liturgie nous apprend que la liberté, la vraie, la liberté intérieure, celle qui nous libère de nos enfermements et de nos égoïsmes, de nos idées toutes faites et de nos certitudes, de nos idoles, nous ne l’avons pas perdue. Peut-être même l’avons-nous retrouvée en nous recentrant sur ce qui est essentiel.

Au milieu du tumulte qu’a été la crise que nous vivons, au terme des bouleversements que nous avons vécus cette année, le Seigneur nous offre, comme un baume, la fête du Christ-Roi. On dirait que les lectures d’aujourd’hui si différentes pourtant viennent rejoindre toutes nos questions. La liturgie d’aujourd’hui nous remet en route en quatre étapes.

Première étape : la lecture du prophète Ezéchiel. Au cœur de nos difficultés, de nos souffrances, de nos tiraillements et de nos morts, laissons-nous rejoindre par notre Dieu qui nous dit : « La brebis perdue, je la chercherai ; l’égarée, je la ramènerai. Celle qui est blessée, je la panserai. Celle qui est malade, je lui rendrai des forces. Celle qui est grasse et vigoureuse, je la garderai, je la ferai paître selon le droit. » Oui, dans cette crise, commençons par accueillir la présence de Dieu. Il est là, à nos côtés, comme il l’a toujours été. Il nous aime et nous accompagne. Jamais il ne nous abandonnera. Oui accueillons sa présence de bon pasteur, sa présence réconfortante.

Deuxième étape, le psaume : Le Seigneur nous invite à aller encore plus loin. Il veut nous rejoindre jusque dans la grande angoisse, l’angoisse de la mort, la peur de la mort : « Si je traverse les ravins de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi : ton bâton me guide et me rassure. » En ce moment, difficile d’éluder la question de la mort dont, pourtant, notre société n’aime pas parler. Aujourd’hui elle s’impose à nous. Des gens meurent autour de nous, les médias en parlent et peut être en avons-nous peur, nous aussi. Là encore, il est venu nous dire qu’il était présent à nos côtés, y compris dans nos angoisses. Il a pris sur lui notre mort. Il l’a vécu et il a même ressenti, comme le dit l’Evangile de la Passion, tristesse et angoisse. Ces sentiments, il les a vécus, il a porté nos souffrances et notre mort.

Troisième étape : Le mystère pascal est développé dans la deuxième lecture : « le Christ est ressuscité d’entre les morts, lui, premier ressuscité parmi ceux qui se sont endormis. Car, la mort étant venue par un homme, c’est par un homme aussi que vient la résurrection des morts. Car c’est lui qui doit régner jusqu’au jour où Dieu aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. Et le dernier ennemi qui sera anéanti, c’est la mort. Et, quand tout sera mis sous le pouvoir du Fils, lui-même se mettra alors sous le pouvoir du Père qui lui aura tout soumis, et ainsi, Dieu sera tout en tous. » Oui le Christ est victorieux. Nous devons accueillir, y compris et surtout dans la crise, y compris et surtout dans la mort, la fécondité du mystère pascal. Il n’y a aucun lieu, aucune situation que le Christ, avec nous, ne puisse transformer en lieu de vie, en situation de vie, en mystère de résurrection. Il a pris sur lui nos morts, pour qu’avec son aide, nous entrions dans l’espérance. La pire crise que l’Eglise n’ait jamais vécue, c’est le vendredi saint. Il y avait de la division, de la souffrance, de la haine, de la peur. Les apôtres eux-mêmes avaient déserté. Les disciples d’Emmaüs avait pris le chemin de la fuite. Tout était perdu, tout était foutu. Pourtant, la puissance de la résurrection, l’amour de notre Dieu a fait de cet échec l’événement du salut. L’Eucharistie, c’est le rappel de cet événement. A partir de cet événement salvifique, nous ne pouvons plus dire que tout va mal. Nous ne pouvons qu’y voir l’occasion d’aimer, l’occasion de laisser Dieu tout transformer. Nous ne pouvons que nous retrousser les manches et permettre au Seigneur Jésus d’entrer dans ces morts, ces échecs pour en faire des lieux de résurrection. C’est justement la quatrième étape, qui nous est décrite dans l’Evangile. Il veut que, par notre charité, nous manifestions son salut, sa résurrection, que nous donnions Jésus au monde en nous mettant au service. Le Seigneur nous dit en substance : « Ce que je vous ai fait vivre et qui est exprimé dans la première lecture, maintenant faites-le vivre aux autres. Je suis venu à vous comme le bon berger qui donne sa vie pour ses brebis, je suis venu vous rejoindre, je vous ai soigné, je vous ai réconforté, je vous ai guéri. Maintenant, ce que j’ai fait pour vous, faites-le pour les autres. Le disciple n’est pas au-dessus du maitre ! Soyez les bergers de mon peuple ». Prenons au sérieux notre baptême qui a fait de chacun de nous, des prêtres, des prophètes et des rois. Souvenons-nous qu’il n’y a qu’un seul prêtre, qu’un seul prophète et qu’un seul roi, mais donnons-le au monde, soyons ses bras pour porter, pour aider, pour soigner, ses yeux pour discerner les lieux où le monde a besoin de lui, sa bouche pour témoigner d’une espérance qui ne vient pas de nous. Nous sommes le corps du Christ pour ceux qui ont tellement besoin de Dieu et qui nous attendent ; ils sont le corps du Christ pour nous qui avons tant besoin de nous libérer de nous-mêmes, de nos habitudes, de nos lourdeurs, de nos replis. Ils nous sauvent, de nous-mêmes et nous leur apportons celui qui s’est fait leur serviteur sans cesser d’être leur roi. Quel merveilleux échange !

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