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Les évêques
L’espérance, ce n’est pas de se voiler la face, c’est de se retrousser les manches

Publié le 02 mai 2020

L’espérance, ce n’est pas de se voiler la face, c’est de se retrousser les manches

Retrouvez ci-dessous l’homélie de Mgr Emmanuel Gobilliard pour le 4ème dimanche de Pâques, dimanche 3 mai 2020.

Le Seigneur est mon berger, rien ne saurait me manquer. Nous connaissons parfaitement ce psaume qui trouve un magnifique écho dans l’Evangile d’aujourd’hui. Jésus révèle à ses apôtres que celui dont parle le psaume, c’est lui. Il est notre bon pasteur, donc rien ne saurait nous manquer. Comme il est important en ce moment que nous redisions cette phrase. Ce passage du psaume, nous devons le comprendre dans la foi et pour la période que nous vivons. Jésus est le bon berger parce qu’il donne sa vie. C’est à cela qu’on le reconnait. Il est très différent des loups qui nous séduisent par des discours et de belles promesses ; il donne sa vie. Et aujourd’hui encore il continue de la donner, et rien ne nous empêchera de recevoir cette vie qu’il nous donne. Certes nous souffrons de ne pas pouvoir vivre l’Eucharistie communautaire, de ne pas pouvoir communier. La communion est une grâce, un cadeau de Dieu, le moyen privilégié qu’il a choisi pour se donner, pour nous transmettre sa vie. Mais si nous sommes empêchés de recevoir la communion, il pourra évidemment nous transmettre sa vie d’une autre manière. Aurions-nous si peu la foi ? Douterions-nous que le Seigneur soit Dieu, et donc qu’il puisse nous rejoindre et nous donner sa vie quoi qu’il arrive ? Le bon berger, nous rappelle l’évangile, donne sa vie pour ses brebis. Ne vous inquiétez pas ! Si vous avez le désir de communier, si vous gardez sa parole, si vous faites mémoire de sa mort et de sa résurrection, si vous l’aimez, il vous donnera sa vie ! Soyez-en sûrs ! C’est une question de foi ! Il nous a promis qu’il serait là tous les jours, jusqu’à la fin des temps. Cet évangile du bon pasteur est vraiment un appel à renouveler notre foi. La foi, nous sommes appelés à la renouveler en méditant sa parole, en lui parlant dans la prière, dans l’oraison. D’ailleurs, ce dialogue intime avec le Seigneur, il en est question dans l’Evangile. Les brebis reconnaissent la voix du bon pasteur, probablement parce qu’elles écoutent, parce que le bon pasteur a l’habitude de leur parler, et que, depuis longtemps le dialogue s’est établi. Nous pouvons toujours vivre ce dialogue intime avec le lui ; nous le devons même ! Sinon comment pourrions-nous reconnaitre sa voix, au milieu de toutes ces paroles qui parviennent à nos oreilles ? D’autant plus qu’il est doux et humble de cœur, et donc qu’il n’a pas l’habitude de parler fort. Le bien ne fait pas de bruit, et le bruit ne fait pas de bien !

Cet évangile est aussi un appel à l’espérance. Les voleurs dont il s’agit dans l’évangile, sont ceux qui nous volent l’espérance. Dans la bible, ils sont appelés prophètes de malheur ! A l’opposé, les vrais prophètes parlent de façon surprenante et un peu à contrecourant, comme Isaïe lorsqu’il dit en plein drame de la déportation : « Oui, voici : je vais créer un ciel nouveau et une terre nouvelle, on ne se souviendra plus du passé, il ne reviendra plus à l’esprit. Soyez plutôt dans la joie, exultez sans fin pour ce que je crée. Car je vais recréer Jérusalem, pour qu’elle soit exultation, et que son peuple devienne joie. J’exulterai en Jérusalem, je trouverai ma joie dans mon peuple. On n’y entendra plus de pleurs ni de cris. » Le prophète de l’espérance n’est pas comme le prophète de malheur, qui profite d’une situation difficile pour dire : « tout est foutu, c’était tellement mieux avant ». Le vrai prophète, le bon berger, Isaïe le rappelle « trouve sa joie dans son peuple ». Cela signifie que, pour que cette espérance soit vécue, il compte sur nous. Le Seigneur nous parle à travers les événements, et il nous avertit.

Notre monde a besoin d’un renouveau, et le premier renouveau, le premier sursaut dont il a besoin, c’est le sursaut de la charité. Nous retrouvons ici notre 3ème vertu théologale : après la foi, l’espérance, parlons de la charité ! Nous pourrons être témoins de l’espérance si nous vivons de la vie du Christ, si nous lui ressemblons. Soyons cette flamme d’espérance qui éclaire en brulant. L’espérance à laquelle le Seigneur nous appelle, ce n’est pas d’attendre un monde qui miraculeusement irait mieux ; l’espérance, c’est de croire qu’il ne nous abandonne jamais et qu’il a besoin de nous. Pas d’espérance véritable sans engagement. Et croyez-moi, nous avons et nous aurons de multiples raisons de nous engager. La situation sociale va se dégrader lourdement, la pauvreté augmentera ; des familles vivent déjà des situations très difficiles, des tensions, des séparations, des deuils. D’autres personnes sont en grande détresse psychologique. L’espérance, ce n’est pas de se voiler la face, c’est de se retrousser les manches. Ce n’est pas sur les yeux que nous devons mettre le masque, mais sur la bouche ! Au contraire, apprenons parfois à nous taire et à ouvrir les yeux en grand pour voir où se trouve la vraie souffrance. Nous cesserons peut-être de nous prendre pour le nombril du monde, de ne penser qu’à nous, à nos revendications et à nos petites libertés. Notre liberté n’est pas menacée. Nos églises sont ouvertes. Certains chrétiens d’orient ou d’autres régions du monde sont privés de liberté. Nous leur faisons honte quand nous affirmons que notre liberté est menacée. Nous ignorons totalement ce qu’est la vraie persécution. Prions plutôt pour eux, qui vivent de très grandes souffrances, et j’ai reçu récemment, à ce sujet, de douloureux témoignages. Certains sont privés de la liberté de prier mais aussi de vivre, de vivre décemment, de se nourrir. Rendons grâce pour ce que nous avons, et allons vers ceux qui n’ont pas cette chance. La grâce de Dieu nous est promise, alors utilisons-la pour faire le bien ; L’Esprit du Seigneur habite en nous. Ecoutez la première lecture ! On nous dit que les apôtres viennent de recevoir l’Esprit Saint, on nous dit que, sous le souffle de l’Esprit Saint ils se renouvellent et proclament que Jésus est le sauveur, qu’il a donné sa vie et qu’il continue de le faire pour nous, ses brebis. Devant la foi et l’espérance de Pierre les auditeurs, qui veulent vivre de cette même espérance crient à Pierre : « Que devons-nous faire ? » Et Pierre de leur répondre : « Convertissez-vous ! » Ma mission de successeur des apôtres, ce n’est pas de gloser, c’est de reprendre pour moi et pour vous tous cette invitation de Pierre.

Oui convertissons nous ! C’est-à-dire : tournons-nous vers le Seigneur, dont l’amour ne nous manque jamais, qui est avec nous comme un bon berger. Prions-le, parlons lui et reconnaissons-le dans le visage de nos frères. Se convertir c’est aussi se tourner vers les autres et vers leurs souffrances. Se convertir c’est arrêter de se replier sur soi et vivre de l’Esprit du Christ, l’Esprit d’amour. Alors oui, nous vivrons la promesse d’Isaïe, nous serons dans la joie profonde que le Seigneur réserve aux bons serviteurs, que le Seigneur accorde à ceux qui se donnent. Notre cœur sera léger d’avoir aimé lorsque notre corps sera fatigué d’avoir servi. Le monde compte sur vous, sur votre foi, sur votre espérance, sur votre charité, ces trois cadeaux, ces trois grâces que seul Dieu peut donner en vérité. Soyons des saints, tout simplement, alors notre monde changera, parce que NOUS aurons changé. Jésus a donné sa vie pour nous ; à notre tour, donnons-la pour nos frères ! La voilà la vocation à laquelle nous sommes tous appelés !

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