Article extrait du magazine Eglise à Lyon, septembre 2025.
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De chimiste passionné à serviteur de Dieu : récit d’une conversion soudaine qui a conduit Nicolas Charrier à devenir prêtre et à s’adonner aux missions d’évangélisation de rue.
Vous n’êtes pas né dans une famille particulièrement pratiquante. Comment avez-vous découvert la foi ?
En effet, j’ai eu un parcours classique : baptisé bébé, catéchisme, première communion, puis j’ai arrêté de croire vers l’adolescence, comme mes amis. J’ai vécu une vie normale, sans Dieu, jusqu’à 25 ans. J’étais chimiste, à cause des explosions, j’ai perdu beaucoup de cheveux ! Une collègue croyante m’a proposé un week-end dans une communauté de Taizé en Bourgogne. J’y suis allé, peut-être plus intéressé par cette fille que par la spiritualité…
Et c’est là que tout a basculé ?
Le deuxième soir, lors de la veillée de prière, voyant tout le monde prier autour de moi, j’ai dit à Dieu dans un élan un peu fou mais sincère : “Si tu existes vraiment, si tu es amour comme on me le dit, viens me montrer que tu m’aimes.” Il ne s’est rien passé sur le moment. Mais le lendemain, dans la voiture sur le trajet du retour, j’ai fait l’expérience de l’amour infini de Dieu. C’était un amour surnaturel qui se faisait tout petit au fond de moi et qui disait : “Je suis là, j’existe et je t’aime.” En même temps, je sentais que Dieu m’appelait à tout lui donner.
Vous aviez pourtant une belle carrière qui vous attendait…
Absolument. On me proposait de de-venir directeur d’entreprise, de gravir les échelons. J’aimais beaucoup la chimie, surtout parce que nous travaillions à fabriquer des médicaments – cela avait énormé-ment de sens pour moi. C’était un vrai renoncement. Mais j’ai découvert que je passais de “chercheur” à “chercheur de Dieu”, et qu’au lieu de guérir les corps, j’allais accompagner la guérison des âmes.
Comment avez-vous vécu la question du célibat ?
C’est une question qui s’est posée concrètement pendant ma formation au séminaire. À 30 ans passés, voyant mes amis se marier et avoir des enfants, le renoncement à la paternité a été très dur. Puis le Seigneur m’a fait découvrir que ma paternité se jouerait autrement. Quand j’ai préparé des adolescents au baptême et que je les ai vus être baptisés, j’ai vécu une joie que j’assimile à celle d’un père voyant naître ses enfants. Je n’aurai pas d’enfants dans ma chair, mais je vois naître des enfants dans l’Esprit.
Il y a eu aussi un moment où je suis tombé amoureux pendant ma formation : une fille idéale, belle, intelligente, missionnaire, spirituelle ! Mais quand j’en ai parlé à mon père spirituel, le simple fait de l’exprimer m’a fait réaliser que l’important n’était pas là, et que Dieu m’appelait sur un autre chemin.
Vous pratiquez beaucoup l’évangélisation de rue. Quelle est votre approche ?
L’été, avec l’association Anuncio, nous allons sur les plages porter l’Évangile aux personnes qui en sont très loin. Notre approche est simple : “Bonjour, je suis Nicolas, je suis prêtre, et nous venons échanger avec vous sur la foi.” C’est intéressant de voir les réactions : très peu nous disent non, et souvent des discussions profondes s’engagent. Les gens savent qu’ils ne nous reverront pas, c’est l’occasion pour eux de partager leurs questionnements sur la foi.
Je me souviens d’un homme sans-abri à Aix-en-Provence qui avait des choses lourdes sur le cœur. Je lui ai proposé la confession. Il ne savait pas ce que c’était. Je lui ai expliqué et nous avons fait ça dans la rue, devant un magasin. À la fin, il m’a dit : “Mon cœur est tellement léger !” Dans ces moments-là en particulier, c’est classe d’être prêtre !
Comment trouvez-vous l’énergie pour vos 22 400 âmes ?
D’abord, Dieu donne la force qu’il faut. J’ai découvert que j’étais hyper pauvre par mes propres forces, mais que Dieu donne toujours la force nécessaire. Ensuite, j’ai mes ressourcements : la prière quotidienne dans l’adoration, ma retraite annuelle sur l’île de Lérins, et le sport trois fois par semaine – je fais du crossfit !
Mais surtout, voir des fruits donne du sens : des personnes qui grandissent dans la foi, qui se convertissent, qui retrouvent la paix. Le père Chevrier disait que “le prêtre est un homme mangé” – consommé par les autres mais transformé en Jésus. Pour être consommé, il faut avoir bon goût ! Il faut se laisser infuser par Dieu pour pouvoir le transmettre aux autres.
Un conseil pour quelqu’un qui s’interroge sur sa vocation ?
Il faut se laisser surprendre par Dieu. Je suis arrivé avec mes plans, mes idées, et j’ai découvert que le Seigneur avait bien d’autres choses en réserve. Chaque prêtre a sa mission propre, son “grain de folie” particulier. L’important, c’est de laisser briller ce rayonnement unique que Dieu veut révéler en nous, même si nous ne sommes pas comme les autres. C’est même mieux ainsi !
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Témoignages à venir du père Luc Garnier (curé à Brignais et Chaponost) et de Claire et François Gérard (parents du père Cinvent Gérard, vicaire épiscopal du Roannais).
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Article extrait du magazine Eglise à Lyon, septembre 2025.
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