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Pauline Jaricot – épisode 5

Pauline Jaricot – épisode 5

Pauline a 45 ans. Après sa conversion, elle a fondé les oeuvres destinées à financer les missions dans le monde entier et à promouvoir la dévotion à la vierge Marie. Les années qui suivent seront consacrées aux soins apportés au monde ouvrier, ce qui la conduira à l’indigence.

Une troisième étape de sa vie : vers la réalisation de son troisième rêve au bénéfice du monde ouvrier. Depuis longtemps, elle a mesuré la misère des ouvriers, surtout au cours des émeutes de 1831 et 1834. Elle cherche un moyen de réaliser une oeuvre qui corresponde à ses aspirations. Ses prières sont incessantes pour demander au ciel de l’éclairer dans ses recherches. Elle écrit :

“Depuis 10 ans, je cherche devant Dieu le moyen de remédier au découragement, à l’immoralité et à l’exaspération qui se manifestent de plus en plus. Il me semble, aujourd’hui, avoir acquis la certitude qu’il faudrait d’abord rendre à l’ouvrier sa dignité d’homme en l’arrachant à l’esclavage d’un travail sans relâche (12 à 14 heures par jour, six jours sur sept !), sa dignité de père en lui faisant goûter les douceurs et les charmes de la famille, sa dignité de chrétien en lui procurant avec la joie du foyer domestique les consolations et les espérances de la religion. En un mot, je voudrais qu’on rendît l’époux à l’épouse, le père à l’enfant et Dieu à l’homme dont il est le bonheur et la fin… (à l’intention des riches). C’est en vain qu’on essaie de moraliser le peuple en s’adressant à son esprit : les cris de douleur ou de la haine étouffent les voix les plus éloquentes… si vous voulez moissonner 100 pour un, soulagez, aimez premièrement et moralisez ensuite !”

Un tel idéal attendait sa réalisation. Etait-ce possible face à l’esprit du monde ne songeant qu’à l’or, qu’au profit ? “Plus je fréquentais les pauvres, plus il m’était donné d’approfondir les maux qui dévoraient la société”. Pour Pauline, ce rêve sera l’épreuve et la croix qui vont jalonner sa route. Sa charité, son coeur, vont échouer face à l’escroquerie habilement dissimulée sous un habit de piété.

Un banquier grenoblois, Jean-Pierre Ailloud, très invest  dans l’oeuvre de la Propagation de la Foi et du Rosaire Vivant, entre en relation avec Mademoiselle Jaricot. Il gagne habilement sa confiance sous des airs dévots au service de l’Eglise. Elle le choisit comme banquier de confiance en 1835. Il va la mettre en relation avec Gustave Perre, maître de forge dans le Vaucluse, qui lui avait emprunté 180 000 francs. Ayant pris connaissance du projet de Pauline de porter secours d’une manière efficace et durable à la classe ouvrière, il lui propose par l’entremise de Gustave Perre, la création d’une usine modèle, réalisant ses rêves. Auparavant, il a eu connaissance des importants revenus de Pauline suite au décès de son père Antoine le 26 décembre 1834.

Les deux personnages sont deux amis, complices escrocs. Ils convainquent Pauline d’acheter l’usine de Rustrel avec ses hauts-fourneaux et ses 900 ha de forêts, dominée par la chapelle Notre-Dame des Anges. Avant de prendre sa décision, elle s’était informée auprès du père Ricard, qui couvre d’éloges les deux amis. Rassurée, elle écrit alors : “Un tel appât fut irrésistible pour moi. Quiconque aime avec passion le bien du prochain et la prospérité de la religion comprendra facilement qu’avec de pareilles assurances, j’en sois venue à l’exécution”. Pauline charge donc Gustave Perre de traiter l’acquisition de la propriété et d’agir en son nom ; Il demande 700 000 francs alors que l’usine est estimée 252 000 francs. Pauline met tous ses revenus à l’achat de la propriété. Comme ils sont insuffisants, elle fait appel à ce qu’elle nomme la banque du Ciel, alimentée par des dons sous forme de prêts sans intérêts. En raison de sa grande notoriété, les dons des petites bourses comme des plus fortunés affluent. Elle espère rembourser avec les bénéfices de l’usine de Rustrel, jugés très importants.

Guy Ledentu

Source : Eglise à Lyon, n°47, janvier 2022, p. 22


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