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Synode sur la synodalité : la synthèse est publiée !

Publié le 16 mai 2022

Synode sur la synodalité : la synthèse est publiée !

La synthèse diocésaine pour le synode sur la synodalité a été finalisée jeudi 12 mai 2022. Vous pouvez la consulter ci-dessous.

La consultation de tous les diocésains s’est déroulée entre le 17 octobre 2021 et le 24 avril 2022. Il y a eu environ 7.500 participants et 750 contributions représentant 1.500 pages.

Les contributions proviennent de paroisses pour 68%, et 82% d’entre-elles ont fait remonter au moins une contribution, certaine jusqu’à 40 .Les autres groupes participants (32% des contributions) sont des communautés religieuses, des groupes bibliques, des associations ou des mouvements (CVX, Communication NonViolente, MCR, Aumônerie collèges/lycées, CMR, ACO, étudiants/jeunes pros, Lourdes Cancer espérance, Vivre et aimer, Scouts et Guides de France, etc).

L’équipe diocésaine constituée de 8 personnes s’est élargie à 26 lecteurs. Le corpus de toutes les contributions a été divisé en 8 selon les thèmes des kits. Chacune de ces 8 portions a été lue par une équipe de trois ou quatre personnes. Ces 8 équipes se sont retrouvées le 8 mai 2022 pour une journée de travail et de mise en commun. Chacune a élaboré une page synthétisant la partie qu’elle avait lue pour la présenter à l’ensemble du groupe des 26 lecteurs.

Nous avons été surpris  – malgré des portes d’entrées différentes – par la convergence et la récurrence massive des propos exprimés dans ces contributions. Nous les avons rassemblé selon la trame souhaitée par l’équipe nationale du synode.

Vous trouverez ci-dessous la synthèse des contributions de notre diocèse, ainsi qu’en téléchargement.

 

« À tout moment, nous rendons grâce à Dieu au sujet de vous tous, en faisant mémoire de vous dans nos prières. Sans cesse, nous nous souvenons que votre foi est active, que votre charité se donne de la peine, que votre espérance tient bon en notre Seigneur Jésus Christ, en présence de Dieu notre Père. Nous le savons, frères bien-aimés de Dieu, vous avez été choisis par lui. » (1 Th 1, 2-4)

 

  1. Comment s’est déroulé le processus de consultation ?

Une équipe diocésaine mixte de 8 personnes a été constituée et a proposé à tous les diocésains des « kits synodalité » prêts à l’emploi avec 4 thématiques : démarche appréciative, après le rapport de la CIASE, pour une Église Peuple de Dieu, rêver l’Église pour demain. Ils ont été utilisés par 2/3 des groupes. Au fur et à mesure de la démarche, des « ambassadeurs » ont été appelés pour relayer et soutenir la démarche synodale dans les paroisses et les mouvements. Nous avons clôturé l’arrivée des contributions le 24 avril 2022. Au total, nous avons reçu :

  • Plus de 750 contributions correspondant à environ 7.500 participants et 1.500 pages.
  • 68% des contributions proviennent de paroisses, 32 % d’autres groupes.
  • 82% des paroisses du diocèse ont participés avec au moins une contribution.
  • Les autres groupes sont des mouvements, des communautés religieuses, des groupes bibliques, mais aussi des groupes de catéchèse, d’aumôneries, de scouts…

Avec le soutien d’un logiciel pour l’analyse de données textuelles, une équipe élargie à 26 lecteurs s’est mise au travail pour le dépouillement et l’élaboration de cette synthèse (dans la suite du texte, les phrases entre guillemets sont des verbatims).

 

  1. Quelle expérience de la synodalité a été vécue ?

C’est la question que nous avons posée à 87 ambassadeurs de la synodalité réunis en visio le 7 mars 2022. Voici leurs réponses :

  • « Joie des échanges et d’être écouté, de prier ensemble ; joie de rencontrer des personnes avec lesquelles on n’a pas l’habitude d’échanger sur notre foi ; joie d’avoir dialogué et de contribuer ensemble au travail synodal proposé par François»
  • « Culture de la synodalité : l’avenir est dans plus de rencontres fraternelles»
  • « Cela a été une expérience pour passer de la division vers l’unité dans la diversité, et non dans la confrontation»
  • « Ce fut un appel à des ouvertures, sortir du jargon, dépoussiérer le langage»
  • « Difficultés à pouvoir inviter et toucher les personnes éloignées, en marge de nos paroisses et nos groupes»

 

  1. Ce qui ressort de manière significative, sans oublier les « petites voix » 

 

Des joies sont exprimées

« Joie à se retrouver en communauté (messe dominicale et temps spirituels) ». Il y a un attachement fort à la communauté, à la paroisse, un très grand désir de fraternité, une reconnaissance pour celle qui se vit déjà. Outre la joie d’entrer dans la démarche synodale, est notée l’existence de nombreux groupes de partage et de rencontre (partage d’Évangile, groupe de prière, associations et mouvements, groupes Alpha, évangélisation de rue), ainsi que la présence des chrétiens dans la vie de la Cité, autant de lieux de rayonnement joyeux de la vie chrétienne. On souligne l’importance des petites communautés locales : partage de la Parole de Dieu, partage de vie, service. « La vie d’Église ne se limite pas à la dimension paroissiale et à la messe ! » « Ne plus penser la vie liturgique comme première, mais comme célébration de ce qui est humainement vécu et partagé prioritairement. »

 

L’attachement fort à la paroisse et à la communauté suscite de grandes attentes, souvent déçues.

Cet attachement à la communauté est aussi un lieu de souffrances, certaines liées à la personnalité du curé, ou plus largement à des fonctionnements structurels où l’on note un manque de fraternité. Or « C’est la fraternité qui définit le « faire Église ». Les manques de fraternité sont majoritairement décrits selon deux axes : l’accueil des baptisés dans leur diversité au sein de l’Église, et l’accueil inconditionnel vis à vis de ceux qui sont au seuil.

 

L’accueil de tous les baptisés dans leur diversité fait défaut

Il est fait référence à des expériences de tensions entre différentes sensibilités qui ont du mal à s’accepter (ce qui plait aux uns déplait aux autres). Certains notent un décalage manifeste entre la génération postconciliaire, souvent retraitée, et les jeunes prêtres ou certaines jeunes familles : ils ont des visions différentes de la liturgie, de la relation au clergé, de l’institution, de l’expression de la foi. Dans les contributions par exemple, les joies vécues avec la liturgie classique sont parfois évoquées mais aussi chez certains la peur d’un retour à une liturgie pré-Vatican II. Un certain rejet réciproque existe, mais aussi par ailleurs un désir de fraternité, le souhait d’une plus grande communion entre les différentes sensibilités au sein de notre Église en essayant de mieux se connaitre. Il est affirmé que la diversité est une richesse dont il faudrait savoir vivre, comme membres différents du Corps du Christ où tous sont indispensables et appelés à nourrir leur foi dans les sacrements. Ainsi, des lieux de rencontres, d’écoute, de convivialité, au-delà de nos cercles paroissiaux apparaissent importants à développer.  Il faut noter que les assemblées paroissiales elles-mêmes ne sont pas le reflet de toute la diversité de l’Église : les associations, les mouvements (par ex. Lourdes Cancer Espérance, Communauté Vie Chrétienne : CVX, Mouvement Chrétien des Retraités : MCR, Chrétiens en Monde Rural : CMR, l’Action Catholique Ouvrière : ACO etc.), sont à valoriser comme partie prenante de la vie diocésaine.

Sur le plan personnel, on note une demande de plus d’écoute et d’accompagnement, le désir d’aimer et de se mettre au service, et l’importance d’être appelé, appelé personnellement par son nom. « Sortir d’une logique administrative pour une logique de relations », où l’on retrouve du sens. Il faut un accueil inconditionnel de toutes et tous. Chaque baptisé est attendu dans toutes les composantes de la vie de l’Église. Nos assemblées paroissiales ne sont pas le reflet de la diversité des baptisés ; sont sous représentés : les jeunes, les personnes seules, les personnes divorcées, les personnes homosexuelles. Nous notons que les pauvres en particulier et plus généralement les personnes vivant une forme de précarité se sentent exclus de l’Église.

Dans ce synode même, la question se pose de savoir si l’on a su atteindre ces personnes.

 

L’accueil de ceux qui sont au seuil de l’Église est insuffisant

Les remontées expriment des sentiments de colère ou de malaise par rapport à la perception d’une forme d’entre-soi et d’exclusion contraire à l’Évangile. La morale de l’Église, en particulier sexuelle et familiale, est très largement incomprise, elle paraît très excluante. La question des divorcés-remariés revient en boucle, la position de l’Église est perçue sur ce point comme archaïque. Une conversion semble nécessaire pour davantage répondre aux préoccupations de notre monde : nous sommes appelés à rejoindre là où elles sont, les personnes qui se sont éloignées. « L’accueil désiré n’est pas au rendez-vous ». Il y a une forte attente sur un accueil inconditionnel et d’importance prioritaire sur toute autre considération. Il faudrait prendre soin de chacun là où il en est, sans jugement, dans une démarche d’écoute puis d’accompagnement à plus long terme. En particulier, quand des personnes plus éloignées se présentent aux moments clés de la vie (baptêmes, mariages, funérailles, moments d’épreuve) il est important de « témoigner plutôt que de prêcher ». Il faut rejoindre les personnes dans leurs réalités humaines et leurs questionnements et non pas attendre qu’elles viennent à nous.

Enfin l’œcuménisme et le dialogue interreligieux apparaissent toujours comme des chantiers importants.

 

Le décalage de l’Église avec le monde

Apparaît souvent le constat d’un « jargon » inaccessible, donc contraire à un visage accueillant de l’Église. Par exemple en zone rurale, il y a un attachement à la paroisse et à l’église paroissiale (bâtiment), mais un détachement vis à vis d’une Église-institution dont le langage est devenu incompréhensible. L’Église apparaît très souvent en décalage avec le monde. Le vocabulaire mais aussi les rites ne parlent plus, ils sont qualifiés d’inintelligibles. « On rêve d’un nouveau ‘langage’ dans le fonctionnement de l’Église et de la liturgie, permettant d’être compris de tous. » Ce problème rejoint celui de la morale, et en général deux approches remontent : mieux expliquer, ou simplifier de manière plus radicale. Pour la morale par exemple, il y a un besoin d’expliquer la différence entre la vision de la personne et le jugement posé sur un acte. L’Église doit vivre avec son temps.

Il y a des demandes de messes « différentes », où l’on remplace l’homélie par un débat par exemple. On note aussi des demandes de messes mieux animées (la paroisse Sainte-Blandine est souvent citée), plus de beauté, de joie, de louange dans la liturgie. Autre proposition : faire appel à des témoins pour rendre la foi vivante : « ne pas proposer un ‘savoir à transmettre’ mais une ‘expérience à vivre’ ». Mais aussi parler davantage des œuvres et des bienfaits que des luttes internes.

 

Un désir de formation et de retour à la source

Néanmoins, beaucoup de voix expriment une volonté de retour aux sources, à la Parole de Dieu, de remettre la relation au Christ au centre de toutes les missions. Les demandes de formation plus approfondie sont aussi récurrentes : il est déploré que les catéchistes ne soient pas mieux formés. Il y a une demande de compétence à tous les niveaux. Le renforcement de la formation est considéré comme important pour tous, et tout au long de la vie. Une tendance à noter : pour les prêtres et les séminaristes, davantage de formation profane, en particulier managériale et affective, avec un recours aux savoirs des sciences (dures et humaines). Pour les laïcs, les connaissances théologiques, bibliques et pastorales sont davantage évoquées. En particulier la théologie sacramentelle et celle qui concerne le prêtre, pour un juste rapport entre clercs et laïcs (voir plus bas). Un goût pour la Parole de Dieu est souvent exprimé, ainsi qu’un souhait de prière communautaire. Il faut non seulement des paroisses accueillantes mais aussi priantes.

 

  1. La réalité actuelle de la vie synodale, ombres et lumières.

 

 La collaboration des états de vie et la gouvernance dans l’Église

S’agissant de l’exercice de l’autorité, et des prises de décision, s’expriment très massivement des voix pour réclamer une plus grande coresponsabilité des baptisés, prêtres et laïcs, selon leur juste place. En particulier, mieux impliquer les jeunes et les femmes, les laïcs en général, ainsi que revaloriser le diaconat et la vie consacrée. Il y a une attente pour transformer nos structures, notamment avoir une gouvernance mieux partagée et équilibrée. L’attitude des laïcs, trop passive est aussi en cause même s’il est noté que cela a évolué.

Plusieurs propositions concrètes sont déclinées, soit au niveau de l’Église nationale et universelle, soit à celui des paroisses et diocèses :

  • La participation ou consultation des laïcs aux nominations des évêques, la prise en compte de l’avis de la communauté pour la nomination du curé.
  • Une meilleure définition des missions, avec une durée limitée (un souhait mentionné : celui d’une vision des projets à 5-10 ans pour générer un élan).
  • Concernant les Équipes d’Animation Pastorale (EAP), certaines fonctionnent bien, mais il demeure des progrès à faire, en particulier concernant la représentativité, la communication sur la constitution de l’équipe, le fonctionnement et les décisions prises, l’évaluation des pratiques, la formation. Il apparaît important de réformer la manière dont les personnes sont appelées à intégrer l’EAP (consultation de la communauté).
  • Un conseil diocésain des laïcs avec voix délibérative pourrait être mis en place.
  • Idée de mettre deux ou trois personnes en responsabilité d’une communauté paroissiale ou diocésaine, au lieu d’une. La gouvernance à tous les niveaux pourrait s’exercer en trinôme : une personne chargée de l’animation de la communauté, une personne chargée de la logistique, une personne chargée du spirituel, prêtre ou laïc formé.
  • Il y a des demandes d’un retour des ADAP (Assemblées Dominicales en l’Attente d’un Prêtre) et de l’absolution collective.

 

La place des femmes dans l’Église (gouvernance et liturgie)

« Le déséquilibre homme/femme n’est pas bon pour l’Église ». Outre la place des laïcs, celle des femmes, en particulier, est considérée comme insuffisante (ceci est souvent exprimé avec force et de manière récurrente). Les femmes, qui représentent statistiquement la moitié des baptisés et de l’humanité, qui assurent dans l’ombre beaucoup de tâches dans l’Église, sont invisibles pendant la liturgie et perçues comme absentes des postes où l’on assume une autorité. La question des petites filles à qui l’on refuse dans certaines paroisses d’être servantes d’autel est souvent soulevée. Des propositions de responsabilités féminines sont faites : lecture et homélies, distribution de la communion, diaconat, sacerdoce, responsabilités de gouvernance.

 

Penser la collaboration en vue de la mission

Cette démarche synodale démontre qu’il est indispensable de sortir d’un modèle clérical avec les risques d’abus qui y sont associés (voir plus bas). Tous veulent marcher ensemble, laïcs et prêtres, mais ne vivent pas toujours la synodalité bien qu’ils en aient le désir. Il y a des références au principe de subsidiarité, qui doit être mieux mis en œuvre. Il faut une collaboration entre les états de vie. Beaucoup sont ou se sentent exclus. Il y a une vraie conversion à faire pour que chacun puisse se sentir appelé au service et à participer à la vie de l’Église et que les talents de chacun soit mis au profit de l’évangélisation. La gouvernance des groupes, des paroisses doit pouvoir être partagée par les multiples talents et compétences qui composent la communauté. C’est une chance qu’il soit indispensable d’entrer dans une dynamique de projet et de travail collaboratif pour la mission.

 

 Le regard sur le ministère des prêtres

Si la critique du cléricalisme est vive, beaucoup de voix affirment aussi une grande sollicitude pour les prêtres, qui doivent être accompagnés et entourés. Certains curés sont jugés lointains, autoritaires, peu à l’écoute (relation trop verticale), d’autres sont tout à fait reconnus pour ce qu’ils apportent de bon. Les laïcs considèrent comme leur rôle d’entourer le prêtre et de lui manifester leur fraternité (mais non exclusivement : l’évêque lui-aussi a la charge des prêtres.) Beaucoup expriment leur préoccupation vis à vis de la solitude des prêtres. La fraternité peut passer par une parole libre, où l’on ose aller dire ce qui ne va pas. « Nous ne devons pas juger nos pasteurs, seul Dieu peut le faire, par contre nous devons pointer les manquements à la vie fraternelle de la paroisse, c’est une lutte contre le cléricalisme ».

Une inquiétude vis à vis de la raréfaction des prêtres, notamment en zone rurale, est aussi exprimée, et le recours aux prêtres étrangers n’apparaît pas comme une solution véritable. Le célibat obligatoire des prêtres est interrogé ou remis en cause dans de nombreuses contributions, et perçu par certains comme une restriction incompréhensible. Il semblerait possible de dissocier appel au presbytérat et au célibat. Des prêtres mariés, ou des prêtres au travail, paraît une évolution envisageable, voire souhaitable. L’ordination des femmes est aussi évoquée.

 

Le rapport de la CIASE (Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Église)

Nous avons proposé un support spécifique dans le cadre des rencontres synodales pour échanger au sujet du rapport et de la crise des abus. Nous donnons une synthèse différenciée de ces contributions parce qu’elles donnent un regard particulier sur la réflexion au sujet de l’Église, les abus étant un symptôme majeur de ses dysfonctionnements. On constate néanmoins beaucoup de convergences avec les points déjà repérés.

Nous constatons un consensus presque unanime pour saluer la décision des évêques d’avoir commandé ce rapport, dont la qualité est louée. Quelques avis très minoritaires sont dubitatifs quant à la méthode de quantification.

 

Réception du rapport : massivement sont exprimés honte et colère devant l’hypocrisie (décalage entre une morale sexuelle perçue comme rigide et les mœurs de certains membres du clergé), ou devant le silence des parents ou des responsables (évêques). Le caractère systémique est reconnu (sauf un groupe). Tous expriment leur sidération devant l’ampleur du phénomène d’abus de pouvoir et d’abus sexuel, leur dégoût devant la volonté de protéger l’institution au détriment des victimes, leur compassion vis à vis d’elles ainsi que des prêtres non coupables qui sont discrédités. Le risque de suspicion généralisée est déploré.

En général les gens n’ont pas perdu la foi, même si quelques-uns se sont éloignés ou ont arrêté leur chemin en Église. D’autres voient au cœur du désastre une espérance : enfin la vérité est dite. Il y a une occasion de passer au crible le catéchisme et les pratiques, de revenir aux sources de l’Évangile et du lien au Christ. C’est une opportunité de conversion pour l’Église et aussi de conversion personnelle ; plusieurs voix évoquent la responsabilité commune, la nécessité pour chacun de consolider la foi véritable.

 

Diagnostics et préconisations : les dysfonctionnements mis en évidence sont ceux du rapport, dont les contributeurs sont bien informés. Il y a beaucoup d’insistance pour que les 45 recommandations soient mises en œuvre (y compris les plus controversées comme celle sur le secret de la confession).

Concernant le Vatican et l’Église universelle, les prélats romains sont perçus comme « une caste d’apparatchiks bien loin du terrain et des préceptes évangéliques ». Il y a une insistance forte pour une plus grande simplicité et humilité de l’Église, un appel à la sobriété. Beaucoup signalent leur incompréhension devant les évêques qui expriment un désaccord vis à vis du pape lorsqu’il veut orienter l’Église en ce sens. Beaucoup demandent une précision de la théologie du prêtre, en particulier la qualification « in persona Christi » souvent mal comprise, occasion de mettre le prêtre sur un piédestal infondé. « Qui donne sa vie au Seigneur, le prêtre ou la maman ou le papa qui élève ses enfants tout en gagnant leur vie parfois difficilement ? »

Au niveau du diocèse et des paroisses :

La collaboration sans condition avec la justice civile et les efforts récents de transparence dans le traitement des abus sont salués. Parallèlement il y a de l’incompréhension au sujet des évêques qui auraient été réticents vis à vis des travaux de la CIASE, ou des personnes qui l’ont publiquement dénigrée (Académie catholique).

A nouveau, beaucoup d’insistance sur la gouvernance partagée pour éviter les abus de pouvoir, avec des laïcs et des femmes dans toutes les instances de décision, en dissociant charge pastorale et gouvernance. Une culture de l’évaluation (si possible interne et externe) est urgente partout où des décisions sont prises et des actions menées, avec des mandats clairs et limités dans le temps pour toutes les responsabilités (y compris les évêques ou les responsables de la curie au Vatican).

L’importance de la formation, humaine et spirituelle des laïcs, des séminaristes et des prêtres en formation continue est là aussi affirmée : théologie du prêtre et théologie sacramentelle ; enseignements sur la sexualité et le consentement dont il faut apprendre à parler ; le droit, la psychologie, le management, les sciences sont beaucoup mentionnées comme importantes pour la formation initiale et continue des prêtres. Pour tous, il faut former à l’esprit critique (dès le catéchisme) et à une conception juste de l’obéissance.

La fraternité paraît un antidote aux abus : il y a nécessité pour les prêtres d’être supervisés et accompagnés, d’avoir des lieux de parole libre. Il faut une séparation entre hiérarchie et accompagnement. Ils doivent être mieux entourés dans les paroisses, mais pas adulés. L’idée de parrainage du prêtre est évoquée, d’accueil un peu plus formalisé dans les familles (par roulements par exemple), de vie en fraternités de prêtres. Plus de fraternité signifie aussi avoir des relations adultes, éviter toute infantilisation des fidèles par le prêtre. Beaucoup critiquent les appellations « Monseigneur » et « Père ». Il faudrait oser dire les choses au curé, prendre ses responsabilités de baptisé en échangeant d’égal à égal. De surcroit, plus de fraternité partout évitera la séduction exacerbée de quelques communautés attirantes qui ont trop d’emprise sur les fidèles, ce qui est un terreau pour les abus.

Concernant les victimes, leur rôle est considéré comme majeur, elles doivent avoir une place active dans l’Église si elles le souhaitent. La compassion et le pardon doivent être exprimés de manière récurrente, par exemple dans des lieux de mémoire et par une journée consacrée à prier pour elles. L’indemnisation réparatrice est approuvée, la demande de justice l’exige, même lorsque le coupable est mort et que la justice pénale ne peut plus rien. L’Église doit la financer en s’appauvrissant et en vendant ses biens, et non par une contribution des fidèles (avis majoritaire mais dans une contribution une personne dit qu’elle accepterait de donner). Enfin pour continuer à libérer la parole, il faut qu’il y ait des structures d’écoute identifiables, pérennes, avec des personnes compétentes.

 

  1. Les « rêves, les envies et les désirs » exprimés ?

« Voyons-nous mourir une certaine forme d’Église, et une nouvelle forme est-elle en devenir » ?

Les rêves exprimés concernent la mission de l’Église dans le monde d’aujourd’hui : la vocation de l’Église est de prendre soin du monde, que chacun puisse prendre sa part de responsabilité et signifier ses accords et ses désaccords. On rêve d’une Église joyeuse et fraternelle car le monde est en attente de spiritualité. L’Église est porteuse d’un message universel.

Beaucoup rejoignent une aspiration à un retour aux sources, à l’élan des premières communautés chrétiennes, dans leur simplicité. Que des ministères actuels ou de nouveaux ministères à créer le soient en fonction des charismes et des besoins repérés. Qu’ils soient uniformément répartis entre hommes et femmes pour retrouver la dynamique des premières communautés chrétiennes dans un temps qui ressemble à celui d’une première annonce.

Le concile Vatican II et ses réformes sont cités à beaucoup d’endroits, pour souhaiter qu’il soit vraiment et enfin appliqué. On craint un retour à la période pré-conciliaire, on espère que l’inspiration du concile souffle à nouveau.

Est évoqué aussi le souhait d’une Église plus « professionnelle » dans son fonctionnement (organes de consultation, mandats, expertise Ressources Humaines – Finances au niveau des diocèses).

Pour terminer, le rêve d’une Église pauvre pour les pauvres est peut-être un signe des temps : l’appauvrissement de l’Église qui doit vendre ses biens pour indemniser les victimes est salué, comme un geste prophétique. Une contribution évoque une Église pensée à l’envers : « les plus pauvres sont au sommet avec tous les baptisés et les prêtres et évêques sont en bas comme un support de l’Église ».

 

Lyon, le 12 mai 2022

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