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Les évêques
« Ah si tu déchirais les cieux ! »

Publié le 29 novembre 2020

« Ah si tu déchirais les cieux ! »

Retrouvez ci-dessous l’homélie de Mgr Emmanuel Gobilliard, pour le premier dimanche de l’Avent, dimanche 29 novembre 2020.

 

« Ah ! Si tu déchirais les cieux, si tu descendais,
les montagnes seraient ébranlées devant ta face. »

Ce cri du prophète est aussi le nôtre et il est tellement légitime que nous le chantons souvent. Il peut s’exprimer de différentes façons : « Je veux voir Dieu, le voir de mes yeux. » « Montre-nous ton visage ! » Nous aimerions tellement que Dieu se manifeste dans sa puissance et sa gloire, dans sa majesté, dans sa victoire ! A telle personne que nous n’arrivons pas à persuader de l’existence de Dieu, nous voudrions tellement qu’il se manifeste. Ne nous est-il jamais arrivé de penser : « Ah lorsqu’il mourra, celui-là, il verra combien il s’est trompé, il verra qu’il aurait mieux fait de ne pas se moquer des chrétiens, il verra que sa richesse ne lui aura servi à rien ! » Derrière ces réflexions il y a à la fois le désir blessé de voir Dieu se manifester de façon directe, et le constat de notre impuissance à faire aimer l’amour, à transmettre le message de l’Evangile. Alors nous crions vers Dieu et nous lui disons : « Déchire les yeux et descends ! » Et nous constatons, comme le prophète à la fin de notre lecture : « Mais tu nous as caché ton visage ! » Pourtant ce que désirait tant Isaïe s’est produit. Ce visage, si longtemps caché, cette face de Dieu, qu’on ne pouvait pas voir sans mourir, nous est apparue. Isaïe avait raison, mais nous avons tort en désirant la même chose que lui, parce qu’entre Isaïe et nous, il y a le visage de Jésus. Alors si nous crions encore vers Dieu pour qu’il montre sa gloire, c’est que nous n’avons pas su accueillir notre Dieu tel qu’il est ! Nous continuons de vouloir qu’il soit tel que nous l’imaginons, tel que nous l’idéalisons. Nous sommes comme les apôtres lorsqu’ils demandaient à Jésus -qui plus est après la résurrection- : « Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas rétablir le royaume pour Israël ? »

Le Seigneur s’est présenté à nous dans le visage d’un enfant, il s’est incarné en choisissant de prendre la figure du serviteur. Il a choisi, comme le dit saint Paul, de s’humilier lui-même. Aujourd’hui, alors que nous voudrions tellement que Dieu prenne la parole directement, il se tait et nous le chanterons à de multiples occasions pendant ce temps de l’avent. « En toute vie le silence dit Dieu…Soyez son cri, et vous aurez tout dit ! » D’ailleurs, ce silence de Dieu que manifeste le temps de l’avent, mais aussi le temps de Noël ne s’est interrompu que trois ans. La vie publique de Jésus, pendant laquelle il nous parle directement n’a duré que trois ans et était précédée de 30 ans de silence et de préparation. Certains me diront : « oui mais maintenant c’est l’Esprit saint qui parle ». A ceux-là je répondrais : « Oui l’Esprit saint a parlé au moment de la pentecôte par les langues de feu, en mettant sur la bouche des apôtres des paroles mystérieuses. L’Esprit Saint a fait comme Jésus. Après une préparation il s’est exprimé, puis il s’est tu. Plus on avance dans le livre des actes des apôtres, plus l’Esprit saint se fait discret. Dieu s’efface pour laisser la place aux médiations qu’il a lui-même choisies, mais aussi pour que nous apprenions à le reconnaitre, comme nous y invitait l’Evangile de dimanche dernier, dans le plus petit d’entre les siens. Dieu ne cesse de nous manifester sa confiance, Dieu met sur nos lèvres sa parole. Ne soyons pas idolâtres, n’attendons pas un faux dieu qui ne viendra jamais. Préparons nos cœurs à recevoir celui qui est déjà venu dans la pauvreté et l’humilité de Bethléem, dans la simplicité de Nazareth, dans le mystère d’abaissement et de souffrance de Gethsémani et du Golgotha. Le mystère de Noël est très proche du mystère de la croix. A Bethléem comme à Jérusalem, Dieu se dit dans le silence, dans le silence de l’humilité et dans le silence de la souffrance. La souffrance est aussi un silence de Dieu que nous avons souvent bien du mal à comprendre. Pourquoi Dieu se tait-il ? Nous voudrions tellement qu’il se manifeste, qu’il guérisse, surtout en ces temps difficiles ; mais à la souffrance de l’homme, Dieu donne la seule réponse valable : sa propre souffrance, le mystère pascal. Dieu se dit avec d’autant plus de force qu’il donne l’impression de se taire.

L’avent n’a pas pour but de faire venir Jésus. Il est déjà venu ! Mais de préparer nos cœurs à le recevoir tel qu’il est, tel qu’il s’est présenté à nous. Cette humilité de Dieu nous permet aussi de l’accueillir dans le mystère de l’Eglise. Dieu se dit dans la parole de ceux qu’il a choisis pour dire sa parole, pour témoigner de son Evangile, c’est-à-dire dans votre parole, dans votre témoignage de vie. Parce que l’Eglise, c’est chacun d’entre vous, chacun de nous rassemblés autour du Christ. En reprenant les paroles du psaume, confions aussi à l’unique pasteur notre nouvel archevêque. Confions lui l’Église et son unité. Demandons-lui de guérir nos querelles, nos divisions, nos blessures : « Dieu de l’univers, reviens ! Du haut des cieux, regarde et vois : visite cette vigne, protège-là ! » Visite cette vigne, ton diocèse de Lyon, protège-le ! Nous savons que nous serons exaucés, parce que, comme le dit saint Paul : « Dieu est fidèle ! » Prenons notre part dans cette construction de l’unité. Soyons des artisans de paix, en puisant la douceur, l’humilité, la bonté dans le cœur de Jésus, le prince de la paix.

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