Publié le 11 octobre 2017
Célébration des obsèques de Laura
Rillieux- la-Pape. Samedi 7 octobre 2017
cardinal Philippe Barbarin
Frères et sœurs, jeudi matin, à Rome, avec tout un groupe de prêtres, nous avons eu l’occasion de rencontrer longuement le pape François. Avant de commencer l’échange, je lui ai parlé de Laura et Mauranne, en lui demandant sa prière, qui rejoint la nôtre ce matin. Aujourd’hui, le 7 octobre, fête de Notre-Dame du Rosaire, le pèlerinage de Lourdes atteint son sommet. Unis à cette démarche, nous voulons confier à la Vierge Marie les deux mamans qui, comme elle, viennent de perdre leur enfant dans une mort si cruelle et si injuste.
(1 Jn 3, 14.16-20 ; Mat 5, 13-16)
Pour commencer, je voudrais remercier ceux qui ont organisé cette célébration et qui ont choisi les textes que nous venons d’entendre. A travers eux, vous nous dites l’essentiel de la vie de Laura : Il ne faut pas aimer seulement « avec des paroles et des discours », ce serait trop facile, et c’est souvent trompeur… Non, il faut aimer « par des actes et en vérité » ! Voilà une interpellation forte pour nous tous.
On peut dire que Laura a suivi cette ligne avec clarté, avec ardeur. On l’a vue se donner tout entière dans les différents domaines où elle s’engageait : le groupe des louveteaux, ici, à Rillieux mais aussi en Ardèche, avec quelle attention elle les suivait ! ; l’école d’infirmières où elle se trouvait en deuxième année (je me permets de dire ma reconnaissance personnelle pour les infirmières ; comme elles prennent soin de nous lorsque nous sommes en état de fragilité !).
Rien que dans les témoignages qui viennent de nous être donnés, et il y en avait certainement encore beaucoup d’autres à entendre, nous avons senti son amour pour tous, et pour sa famille d’abord et tous ses proches : ce désir de descendre à Marseille pour l’anniversaire de sa chère cousine – peut-être Mauranne avait-elle décidé de monter à Lyon, mardi prochain, pour fêter elle aussi les 21 ans de Laura ?-, son amour pour Sébastien. Tu nous as confié tout à l’heure, Sébastien, que tu te sentais perdu du fait de son absence, et à la fin de ton témoignage, on avait l’impression que c’était Laura elle-même qui te répondait : « Tu sais bien que je suis, que je serai toujours avec toi ! » Voilà les mille et une lumières qui viennent de toute sa vie et qui nous montrent très simplement ce que veut dire aimer « par des actes et en vérité ».
C’est alors que nous avons entendu la parole de Jésus dans l’Evangile : « Vous êtes le sel de la terre…, vous êtes la lumière du monde » Comme le sel donne le goût aux aliments, cet amour en actes et en vérité change tout, transforme et éclaire tout, même notre souffrance. Je pense aux mots impressionnants que la maman de Mauranne a lus, avant-hier, à Eguilles : « Puisons dans toute notre colère – une grande détresse, en effet… – pour apporter un message d’amour et de paix à un monde qui en a tant besoin ! »
Frères et sœurs, c’est un beau chemin qui nous est tracé. Le P. Collado, que je veux remercier devant vous tous, a été un bon frère pour écouter tout le monde et laisser chacun exprimer sa souffrance : les scouts, Sébastien, les parents de Laura avec qui il a eu un long échange. Il a été un bon père pour les petits louveteaux qui arrivaient devant lui en larmes. A chacun d’eux il disait tout simplement : « Arrête de pleurer, rappelle-toi tout ce que Laura t’a apporté, la lumière qu’elle t’a donnée … » Alors le visage des enfants s’éclairait, un peu de paix revenait.
Ce chemin, vous le savez bien, c’est à nous de le vivre maintenant, chacun à sa manière, malgré la cruelle souffrance de cette séparation et grâce à la lumière que Laura laisse dans nos cœurs. Mais ne croyez pas que pour Laura, les choses s’arrêtent là. Elle va continuer à nous offrir son amour, à veiller sur nous. Le centre de la foi des chrétiens, depuis ce matin de Pâques où Jésus est ressuscité d’entre les morts, c’est qu’ « avec la mort, la vie n’est pas détruite ; elle est transformée ». La vie nouvelle de Laura devient un mystère de lumière, une présence que nous percevons encore. Nous sommes nombreux à continuer de parler avec elle, malgré son absence. Savez-vous que dimanche dernier, 1er octobre, le jour du drame, c’était la fête de sainte Thérèse de l’enfant Jésus ? Elle aussi, elle est partie jeune, emportée par la maladie vers 23-24 ans, à Lisieux. Aux sœurs qui l’entouraient, elle a demandé de ne plus pleurer et elle leur a laissé comme dernière phrase ces mots de consolation : « Je passerai mon ciel à faire du bien sur la terre. »
Aujourd’hui, nous prions pour que Laura entre dans la Maison de Dieu et trouve la place que Jésus est allé lui préparer, comme à chacun de nous. Dans ce lieu de lumière et d‘amour intenses, elle ne cessera de s’occuper de nous. Je vous le dis à tous, frères et sœurs, et d’abord à ses parents, à chacun des membres de sa famille et à Sébastien. Je le dis aussi à tous ceux de l’école d’infirmières et du groupe des Portes de la Dombes. Je vous le dis surtout à vous, les petits louveteaux. Vous n’êtes pas parmi nous ce matin, mais nous pensons tous à vous. Nous savons qu’à la veillée d’hier soir, vous avez su dire votre MERCI à Laura. A travers les papiers et les dessins qui sont déposés auprès de son corps, en ce moment vous lui dites votre amour. Demandez au Seigneur, demandez à Laura ce dont vous avez besoin pour avancer, pour retrouver la confiance et devenir à votre tour des adultes libres qui sèment le bonheur autour d’eux. Il viendra sans tarder, le jour où vous aurez à servir à votre tour, et à aimer« par des actes et en vérité ». Frères et sœurs, en ce moment, nous sommes tous aussi démunis que des enfants. Ne craignons donc pas de demander beaucoup, de demander à Dieu l’essentiel. Et dans le Royaume de l’amour et de la lumière, Laura continuera de prendre soin de nous tous. Elle aussi, elle passera son ciel à faire du bien sur la terre.
