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Les évêques
Homélie de Noël 2018

Publié le 25 décembre 2018

Homélie de Noël 2018

Les textes que la liturgie nous propose aujourd’hui, sous des apparences tranquilles et consensuelles, sont en fait à contre-courant de ce qui nous est proposé dans la plupart de nos médias et de nos lieux de consommation.

Dans la première lecture, il est question d’un peuple qui marchait dans les ténèbres. Les ténèbres dont il s’agit, ce sont les ténèbres du péché, de l’orgueil, de la volonté de puissance, du désir de posséder toujours plus. Nous devons accueillir cette parole exigeante de notre Dieu qui veut nous réveiller, nous sortir d’un individualisme qui considère le bien-être comme le but ultime de la vie. Dieu veut pour nous le bonheur qui dépasse infiniment nos perspectives trop courtes, où le pouvoir d’achat devient un dieu qui ne cesse de nous rendre insatisfait en nous poussant à consommer toujours plus. Même si nous devons nous battre pour que tous les hommes puissent mener une vie digne, aient les moyens nécessaires, nous devons constater que nous vivons, pour la plupart, au-dessus de nos moyens. Avons-nous besoin, réellement de tout ce que nous possédons ? A moins que cette fièvre acheteuse serve surtout à nous faire oublier notre solitude fondamentale, notre manque d’espérance, à recouvrir d’un onguent anesthésiant, une souffrance intérieure qui vient d’un manque de foi. La joie dont il s’agit dans la première lecture, n’est pas la joie psychologique que créent quelques illuminations extérieures, quelques musiques commerciales, ou un sapin bien décoré. Ces éléments, aussi importants soient-ils, doivent être les signes d’une joie profonde et non les déclencheurs d’une joie superficielle qui s’éteindra aussi vite qu’elle est arrivée. Notre joie, c’est d’être aimés, c’est d’être sauvés. La joie, du chrétien, c’est de savoir que Dieu s’intéresse à lui, vient à sa rencontre et le serre dans ses bras pour lui dire combien il l’aime. Cette annonce de l’amour de Dieu que nous avons entendue dans l’Évangile, n’est pas seulement pour des privilégiés. Elle est pour tous, et d’abord pour ceux qui en ont le plus besoin. Regardez bien le texte ! A qui la gloire de Dieu est-elle révélée en premier ? Aux bergers ! Les bergers de l’époque de Jésus, étaient les exclus de la société. Ils étaient considérés comme impurs et ne pouvaient pas entrer dans la synagogue. Ils étaient ceux qui n’intéressaient personne, ceux dont on ne parle pas, qu’on n’écoute pas, qu’on ne prend pas en compte. Dieu, d’une manière extraordinaire, les valorise, les élève et les invite à partager sa joie. La joie que Dieu nous propose est une joie qui se vit dans la relation. A la crèche, il n’y a rien de brillant, rien qui fasse du bruit. J’y vois une famille toute simple, qui rayonne, qui ne se replie pas sur son bonheur, mais qui trouve sa joie à y inviter tous ceux qui ne peuvent pas vivre cette joie de la rencontre et du partage. La joie de Marie et de Joseph, c’est bien sûr cet enfant, mais c’est aussi tous ces gens qui viennent et qu’ils ne connaissent pas, les bergers, et les mages. C’est en fait chacun de nous. Parce que la joie de cette sainte famille, c’est de se donner, d’ouvrir sa porte, de ne pas garder pour elle ce qu’elle a de plus précieux. Et pourtant ils n’ont rien ! Ou plutôt, ils ont tout et ne possèdent rien. Ils sont l’antithèse de ces valeurs qui sont sensés nous combler. Tout ce que nous avons, ils ne l’ont pas, et n’en ont pas besoin. Tout ce qu’ils ont, ils nous le donnent, à condition que nous venions à eux, que nous découvrions, au fond de notre cœur, combien nous avons besoin de ces joies simples, combien nous avons besoin d’être aimés, d’être reconnus pour ce que nous sommes, d’être accueillis simplement. Et Dieu ne peut pas nous offrir cette joie, si nous n’exprimons pas ce besoin d’être sauvés, si nous ne nous approchons pas de lui. Il ne peut pas nous forcer à le rencontrer, à l’aimer. Il respecte notre liberté au point de ne pas nous brusquer, ou point de se présenter à nous dans la faiblesse d’un enfant. La puissance de Dieu se révèle dans l’humilité et la pauvreté. Nous préférerions peut-être un Dieu conquérant, qui réponde à toutes nos attentes les plus folles, que nous pourrions accuser, dès que nous sommes en colère, dont nous voudrions qu’il nous donne tous ces faux bonheurs que nous exigeons comme des enfants gâtés. Ce qu’il nous donne est pourtant beaucoup plus précieux, beaucoup plus nécessaire à notre bonheur que tout ce à quoi nous rêvons. Il nous tend la main comme un mendiant et nous rend ainsi notre dignité. Notre Dieu a besoin de nous. De quel Dieu avons-nous vraiment besoin ? D’un Dieu qui nous comblerait de cadeaux, qui nous submergerais par ses qualités, par sa beauté, sa force et sa puissance, qui nous écraserait de sa perfection, pour bien nous montrer combien nous sommes différents de lui, éloignés de lui.

Notre Dieu nous rejoint, il s’incarne, il prend sur lui notre pauvreté, nos difficultés et nos souffrances, nos manques d’amour et nos humiliations, nos blessures et nos déceptions. Depuis qu’il s’est fait enfant, il nous ressemble, il nous tend la main, et nous dit humblement : « j’ai besoin de toi ». A un Dieu qui me dirait « je te donne tout ce que tu désires », je préfère un Dieu qui me dise : « J’ai besoin de toi. Tu es important à mes yeux. Donne-moi ton cœur et laisse-toi aimer. J’ai confiance en toi ! » La voilà la joie de Noël : il a rendu aux bergers leurs dignité pour nous dire qu’à nous aussi il veut rendre une dignité, il veut offrir une joie profonde et durable, si nous acceptons de nous approcher de lui, si nous acceptons, à notre tour, d’avoir besoin de lui. Le mystère de Noël est inséparable du mystère de Pâques, du mystère de la croix. Là aussi, notre Dieu semble impuissant, cloué au bois de l’infamie. Là aussi un choix s’offre à nous. Nous sommes à ses côtés, représentés symboliquement par ces deux brigands qu’on a crucifié avec lui. Le premier le met au défi et lui dit « Sauve-toi toi-même et nous aussi », tandis que le second lui ouvre son cœur avec humilité et lui dit : « Souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton royaume ! »

Approchons-nous de Jésus, comme ce bon larron et disons-lui : « Seigneur, j’ai besoin de toi. Tu vois que je suis un pauvre type, pécheur, orgueilleux, trop replié sur lui. Tu connais mes erreurs et mes errances, mes doutes et mes faiblesses. Toi seul peut m’aimer tel que je suis. Avec les autres, je ne peux pas me montrer tel que je suis ; je parade, je mens, je m’affirme avec force. Mais au fond de moi, je sais que je me trompe de bonheur. Mon bonheur, c’est de vivre ce que tu proposes aux bergers, c’est de vivre la joie simple d’une charité qui se donne, qui rayonne, qui se propose sans s’imposer. Mon bonheur, c’est de vivre la simplicité de la crèche, la vérité de noël, loin de ces idoles que j’ai créées ou qui me sollicitent sans cesse, loin de ces lumières extérieures. Mon bonheur, c’est cette lumière intérieure que tu mets au plus profond de moi, c’est cette vie, cet amour, qui me guérissent de mes peurs.

Oui Seigneur sauve-nous. Merci pour ce jour qui finit, merci pour cette nuit qui vient. Dans ce jour qui finit, je n’ai pas été ce que j’aurais dû être. Fais-moi meilleur Seigneur, plus doux avec les autres, plus exigeant pour moi. Et apprend moi à me donner, avec simplicité. Dans ce jour qui finit, des hommes et des femmes ont souffert. Aide-les, si c’est possible. Fais que quelqu’un vienne apaiser leur peine et soulager leurs souffrances. Donne à tous l’Espérance véritable, ton amour qui relève et nous sauve. Merci pour cette année qui finit, merci pour cette année qui vient.

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