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Les évêques
Homélie pour le 3ème dimanche du temps ordinaire

Publié le 24 janvier 2021

Homélie pour le 3ème dimanche du temps ordinaire

Retrouvez ci-dessous l’homélie de Mgr Emmanuel Gobilliard pour le 3ème dimanche du temps ordinaire.

 

Le meilleur interprète de la Parole de Dieu, c’est le Verbe de Dieu, évidemment, c’est Jésus ! Or Jésus, nous le lisons dans l’évangile selon saint Luc au chapitre 11, a parlé de notre prière lecture. Voici ce qu’il en a dit : « Cette génération est une génération mauvaise : elle cherche un signe, mais en fait de signe il ne lui sera donné que le signe de Jonas. Car Jonas a été un signe pour les habitants de Ninive ; il en sera de même avec le Fils de l’homme pour cette génération. »

Le grand signe, le seul signe c’est le signe de Jonas. Mais quel est ce signe ? Quand j’étais scout, j’aimais beaucoup la cosmologie. Je crois qu’il y a un badge pour cela. Et la constellation qui me fascinait, c’était justement celle du cygne, dont j’ai longtemps cru que cela s’écrivait comme le signe de Jonas justement, et pas comme l’animal. D’ailleurs, cette constellation ne ressemble pas du tout aux cygnes de nos lacs. Cette constellation c’est une grande croix dans le ciel. Le vrai signe, le seul signe, c’est le signe de la croix, c’est le mystère pascal, le mystère d’amour d’un Dieu qui s’abaisse jusqu’à terre, qui nous aime jusqu’à prendre sur lui notre péché, notre mort. Ce signe pascal est partout présent dans le livre de Jonas : « Trois jours et trois nuits dans le ventre du poisson » et aujourd’hui nous lisons qu’il a fallu également trois jours à Jonas pour traverser la grande ville, comme il a fallu trois jours au Seigneur pour traverser la mort et nous ouvrir à la vie, à sa vie. La mission de Jonas dans la première lecture, comme celle de Jésus dans l’Évangile, c’est de nous inviter à la conversion. La conversion, ce n’est pas, du jour au lendemain, se mettre à être parfait, à tout faire bien, à mener une vie moralement acceptable. La conversion, c’est un retournement, comme celui de Marie-Madeleine au tombeau, un retournement vers celui qui nous appelle : « Venez à ma suite, je vous ferai devenir pêcheurs d’hommes ! » La conversion, c’est se tourner vers le visage infiniment aimant de Dieu, vers la tendresse du Père, tellement bien signifiée dans la parabole de l’enfant prodigue. Nous chantons au premier jour du carême ce beau retournement, ou plutôt nous prêtons notre voix au Seigneur qui ne cesse de chanter ce refrain : « Revenez à moi, de tout votre cœur, car je suis un Dieu de tendresse ! » La conversion, c’est d’abord une rencontre, un dialogue intime avec cet amour, avec la source de tout amour. La conversion c’est se laisser toucher d’abord par l’appel de Jésus puis par son action, c’est se laisser mouvoir par l’Esprit Saint. La sainteté, qui est la conséquence de cette conversion, c’est cela : se laisser saisir par l’Esprit pour que, la Trinité ayant fait en nous sa demeure, nous devenions ses mains pour servir, ses pieds pour aller à la rencontre, ses oreilles pour écouter, sa bouche pour louer, son cœur pour aimer. La sainteté c’est accepter d’être des temples de l’Esprit Saint, d’être le corps du Christ, individuellement mais aussi collectivement. C’est ce beau travail que le Seigneur fait dans l’Évangile, en appelant chaque apôtre individuellement mais aussi en leur apprenant à s’aimer, à former une communauté, l’Église, corps du Christ, temple de l’Esprit. C’est un cadeau que nous fait la liturgie aujourd’hui de nous faire méditer sur ce qu’est la conversion véritable. La vie chrétienne n’est pas d’abord une morale, elle est d’abord une rencontre. Je ne suis pas chrétien d’abord parce que j’agis bien, comment le pourrais-je, moi qui suis pécheur, tellement influencé par le péché originel ? La vie chrétienne est d’abord une rencontre vivante avec le Christ, l’humble acceptation du regard d’amour qu’il pose sur nous, et notre réponse. « Aussitôt laissant là leurs filets, ils le suivirent ». Ensuite, eh bien il suffit de lire la suite de l’Évangile : la conversion, c’est une vie avec le Christ ! La vie morale, qui est évidemment nécessaire, c’est la conséquence de cette rencontre, de cette vie avec Jésus. Ayant rencontré Jésus, ayant accueilli son amour pour moi, le don de sa vie dans le grand signe qu’est le mystère pascal, alors, ma vie entière en est transformée. Je découvre combien le bonheur, qui est un synonyme de la sainteté, c’est de se tourner vers l’Autre, de se tourner vers les autres. C’est l’autre facette nécessaire de la conversion. La conversion c’est sortir de soi, de ses préoccupations, de ses idées aussi, de ses crispations pour se tourner vers les autres. Comme Jésus, tout tourné vers le Père, le prologue de l’Évangile de saint Jean le proclame, tout tourné vers les hommes et les femmes qu’il rencontre dans l’Évangile. Il ne garde rien pour lui, il ne possède rien, si personne. C’est d’ailleurs en ce sens qu’il faut interpréter la deuxième lecture. Quand vous entendez saint Paul nous dire « que ceux qui ont une femme soient comme s’ils n’en avaient pas », cela ne signifie surement pas qu’ils doivent quitter leur femme, ni qu’ils doivent la négliger. Bien au contraire. Cela me rappelle ce témoignage d’un jeune homme. J’ai lu son témoignage dans un article de la revue Il est Vivant. Au début de l’article, avant de raconter sa vie, cet homme nous dit qu’après quelques années de mariage il avait découvert que le mariage, ce n’était pas pour lui. On avait envie de lui dire : « Eh bien mon gars tu aurais pu t’en apercevoir avant ! Et puis au fur et à mesure de la lecture de l’article on se demande ce qu’il veut vraiment nous dire. Il nous raconte ses difficultés, ses combats, les exigences qui sont celles du mariage, et finalement la révélation : je me suis rendu compte que le mariage n’était pas fait pour moi…mais pour elle ! Magnifique ! Il avait vécu une conversion. Il s’était retourné, il était sorti de lui, pour se tourner enfin vers Dieu, vers elle, vers Dieu présent en elle. Cette deuxième lecture signifie : « détachez-vous de vous-mêmes » Ne possédez rien, et surtout pas votre femme ou votre mari. D’ailleurs la suite nous éclaire en ce sens : « ceux qui font des achats, comme s’ils ne possédaient rien ! » et mieux, « ceux qui pleurent, comme s’ils ne pleuraient pas ! » Cela ne signifie pas qu’il faut avoir peur de ses émotions, au contraire, cela signifie que même la souffrance peut nous replier sur nous-mêmes, et nous faire voir la réalité uniquement de notre point de vue. La perspective devient le désespoir. Le Seigneur nous invite à entrer dans l’Espérance, à nous convertir, à ouvrir nos yeux à sa lumière et à toutes les traces de son amour qu’il ne cesse de déposer délicatement sur notre chemin. Celle qui avait cette incroyable capacité, c’était Claire de Castelbajac, capable de faire de tout événement, fut-il douloureux, et je pense aussi à la pandémie que nous vivons, l’occasion de rencontrer les autres, de les aimer mieux, de se donner, l’occasion de rencontrer Dieu, comme Marie, toute tournée vers Dieu dans son magnificat, toute tournée vers les autres, comme aux noces de Cana.

« Aussitôt, laissant là leurs filets ils le suivirent ! » « Aussitôt les gens de Ninive crurent en Dieu ». N’ayons pas peur ! Écoutons l’appel d’amour de notre Dieu, contemplons le grand signe qu’il nous donne dans le mystère pascal, et laissons-nous agir par l’Esprit. Amen

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