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Les évêques
Homélie pour le dimanche des Rameaux

Publié le 11 avril 2022

Homélie pour le dimanche des Rameaux

Retrouvez ci-dessous l’homélie pour le dimanche des Rameaux, dimanche 10 avril 2022, de Mgr Emmanuel Gobilliard.

 

Nous avons entendu dans cette célébration la lecture de deux évangiles, le premier nous rappelle l’arrivée triomphale de Jésus à Jérusalem, le second, sa passion. C’est comme une inclusion : les deux termes d’une même réalité pour signifier la totalité de la réalité, la totalité de ce qu’il a vécu pour nous. On l’a acclamé et on l’a insulté, on l’a accueilli et on l’a rejeté, on a crié Hosanna et on a crié, quelques jours plus tard : « Crucifie-le ». Le but de cette semaine sainte qui commence, n’est pas de se remémorer seulement ce que Jésus a vécu et de verser quelques larmes. Ce que doit provoquer en nous cette grande semaine, ce n’est pas l’émotion, mais la conversion. Lorsque nous contemplons la passion de Jésus, c’est bien, c’est même nécessaire, mais cela ne suffit pas. La conversion, c’est d’être surpris, saisi par Jésus. Tout le temps du carême est un temps de conversion, non pas parce que nous faisons des efforts de carême, que nous ne réussissons jamais d’ailleurs, mais parce que nous rencontrons Jésus qui vient à notre rencontre. Les efforts, le jeûne préparent cette rencontre mais ne sont pas cette rencontre elle-même. Et si nous en restons à l’émotion, si nous nous écoutons trop nous-mêmes, nous finirons, immanquablement par le trahir, comme la quasi-totalité des disciples et des apôtres. Si nous considérons d’abord la dimension morale de la vie chrétienne, nous sommes sûrs d’échouer également, parce que nous sommes pécheurs. La vie chrétienne, comme son nom l’indique est d’abord une vie avec le Christ. C’est pour cela que le carême est le temps privilégié de la conversion. Même si vous êtes le plus grand pécheur, même si vous n’avez pas réussi à faire fidèlement votre effort de carême, même si vous n’avez pas suffisamment respecté le jeûne et la pénitence, Jésus sera toujours là pour vous appeler, pour vous relever, pour vous pardonner, pour vous enseigner, comme il l’a fait à Pierre, à Thomas, à Marie Madeleine, aux disciples d’Emmaüs et à Paul…

La conversion, cela ne se situe pas dans l’imaginaire, qui suscite l’émotion, cela se situe dans la vie réelle, et dans la vie réelle, Jésus vous appelle sans cesse, dans votre devoir d’État, dans votre oraison du matin et dans le mystère de l’Eucharistie, dans le visage du pauvre qui vous supplie, ou de vos enfants qui vous agacent, dans ce courrier que vous avez la flemme d’écrire ou ce coup de téléphone à un ami en dépression. La conversion, elle est permanente, parce que la présence de Jésus à vos côtés est permanente. Et la conversion c’est simplement de l’accueillir dans sa vie, de lui tenir la main. La vie chrétienne, si elle est un refuge pour ne rencontrer que des gens qui pensent comme nous, elle passe, insensiblement d’un lieu de conversion, de rencontre avec Jésus, à un petit club d’amis… de pharisiens sûrs d’avoir raison. Pendant cette semaine écoutez les cris que Dieu vous adresse, écoutez ses appels. Cela s’appelle la vocation ! La vocation, ce n’est pas seulement de faire une grande prostration, de vivre une ordination, ou une célébration de mariage. La vocation c’est d’entendre et de répondre aux appels incessants, de son mari, de sa femme et de ses enfants, de ses sœurs de communauté. En un mot, de Jésus ! C’est ce que certaines traditions spirituelles appellent l’oraison permanente, c’est-à-dire le dialogue permanent avec Jésus, même inconscient. La prière et l’adoration en font partie, mais nous sommes en relation avec lui toujours, et toujours nous pouvons lui parler, parce que toujours il nous écoute. L’ennemi de la conversion, c’est de caser sa vie spirituelle dans un cadre précis, immuable, bien défini, dans la messe du dimanche matin, l’adoration du mercredi soir, la week-end scout, et de lui dire, le reste du temps, laisse-moi tranquille. Je te donne le dimanche matin, laisse-moi vivre le samedi soir sans toi.  Cela peut paraitre exigeant, mais c’est libérant. Cela ne veut pas dire que vous n’allez pas pécher, cela signifie que vous le laissez vous rejoindre même dans votre péché, comme Pierre qui au cœur de son péché, de sa honte, laisse Jésus venir à lui pour lui dire qu’il l’aime. Si vous considérez la vie chrétienne non pas comme une vie avec Jésus mais comme un défi moral, alors vous serez alternativement orgueilleux, honteux, insatisfait, exalté, et vous finirez dans une acédie, ou une dépression spirituelle dangereuse. La réalité, c’est que nous sommes tous pécheurs, que nous sommes tous imparfaits, que nous tombons tous, et que tous nous sommes insatisfaits de notre effort de carême que nous avons, bien sûr raté, mais que pour tous Jésus est là quand même, qu’il est là toujours, qu’il nous pardonne et qu’il nous aime. La conversion, c’est d’accepter d’être regardé par lui, c’est de l’écouter et d’accueillir avec joie cette phrase qu’il nous susurre à l’oreille : « Je sais que tu es imparfait, que tu es pécheur, mais j’ai besoin de toi. Suis-moi ! »

+Emmanuel Gobilliard

Evêque auxiliaire du diocèse de Lyon

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